Gallimard, 2020.
Nous suivons Laurence. Dès sa naissance, elle est brimée par sa situation de « fille ». Son sexe va définir son parcours. J'ai trouvé ce propos très pessimiste. Je crois que j'ai grandi dans une bulle. Je suis la seule fille d'une fratrie de trois , petite dernière après deux garçons, je n'ai jamais eu la sensation d'être un « poids » et un « boulet ». Ai-je eu de la chance ? Suis-je un OVNI ? Je ne nie pas ce qui est écrit dans Fille. Je suis consciente que tout ce qui est écrit est réel et juste. C'est la cumulation qui me questionne. J'ai décidé de prendre cette histoire dans son côté métaphorique et j'y ai finalement cru. Comme un essai de ce qu'est être une fille au XXème et XXIème siècle, ce roman nous questionne sur la féminité, la maternité, la sexualité. J'ai été très émue par les différents malheurs et les nombreuses tragédies de la vie de Laurence. Le texte est très bien écrit. La fin laisse poindre une lueur, une éclaircie dans la vie des femmes. Elles font bouger les choses, osent parler, font leurs propres choix.
Un texte difficile, mais à lire comme une grande allégorie de la vie d'une femme.
" A propos de filles, il y a une chose bizarre. Tu es une fille, c'est entendu. Mais tu es aussi la fille de ton père. Et la fille de ta mère. Ton sexe et ton lien de parenté ne sont pas distincts. Tu n'as et n'auras jamais que ce mot pour dire ton être et on ascendance, ta dépendance et ton identité. La fille est l'éternelle affiliée, la fille ne sort jamais de la famille. Le Dr Galiot, au contraire, a eu un garçon et il a eu un fils. Tu n'as qu'une entrée dans le dictionnaire, lui en a deux. Le phénomène se répète avec le temps : quand tu grandis, tu deviens "une femme" et, le cas échéant, "la femme de".
L'unique mot qui te désigne ne cesse jamais de souligner ton joug, il te rapporte toujours à quelqu'un - tes parents, ton époux, alors qu'un homme existe en lui-même, c'est la langue qui le dit, comme la grammaire t'expliquera plus tard, dans ta petite école de filles jouxtant celle des garçons, que "le masculin l'emporte sur le féminin".
1 commentaire:
J'ai eu un peu le même ressenti sur "Kim Jiyoung" qui se passe en Corée. On a l'impression que l'autrice aurait mieux fait d'écrire un essai. Ceci dit, je pense que dans les années 60 (j'en ai de clairs exemples autour de moi), avoir un garçon était source de fierté, encore plus qu'aujourd'hui. Moi non plus je n'ai pas l'impression d'avoir été désavantagée, mais avec le recul les attentes professionnelles étaient plutôt du côté de mon frère alors que j'étais meilleure élève que lui pendant longtemps. Je pense qu'inconsciemment, on ne traite pas de la même façon son fils et sa fille. En lisant Beauvoir, j'ai réalisé que même une personne qui se pense déconstruite en partie comme moi tombe dans certains panneaux.
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