La malédiction des pharaons
Elizabeth Peters
Livre de poche, 1981.
" C'était bien l'intention de sir Henry de poursuivre ses fouilles à Louxor jusqu'aux fondations de l'édifice pour s'assurer que la sépulture n'avait pas été découverte lors de la précédente expédition.
Et de fait, à peine les ouvriers s'étaient-ils mis à l'oeuvre, que leurs pelles dégagèrent la première marche d'un escalier taillé dans le roc. Le Times en fit un compte rendu détaillé en page trois. La dépêche suivante, en provenance de Louxor, eut droit en revanche à un gros titre en première page. Sir Henry Baskerville était allé se coucher la veille en pleine santé. On l'avait retrouvé le lendemain matin dans son lit, rigide et sans vie, le visage déformé par l'épouvante.
Sur son front, on reconnaissait, grossièrement dessiné avec du sang, un uræus, le cobra sacré des anciens Egyptiens, le symbole divin des pharaons. "
Une fois encore, l'impavide Amelia Peabody, son mari, l'éminent égyptologue Radcliffe Emerson, et leur fantasque rejeton, le jeune Ramsès, devront affronter le mystère et conjurer la malédiction des pharaons.
J'ai découvert Amelia Peabody avec le premier tome de ses aventures, Un crocodile sur un banc de sable, il y a quelques années. L'ambiance British, l'Egypte, l'humour de la plume de Peters m'avaient emballée. Ce second tome fut un régal. Les romans d'Elizabeth Peters rentrent sans aucun doute dans ma liste de romans qui rendent heureux. Une série "Feel good" à découvrir très vite si ce n'est pas déjà fait.
La série Amelia Peabody s'inscrit dans la tradition des vieux policiers tels Agatha Christie ou Patricia Wentworth, mais avec une plume plus moderne. Je tombe complètement sous le charme de cet univers envoûtant. C'est moins pour l'intrigue policière que pour l'ambiance, les personnages, les dialogues que je me suis régalée. Le mystère entourant la mort de Lord Baskerville bien qu'intéressant n'est pas l'attrait principal de ce roman. Rien que pour les personnages d'Amelia et Emerson, cette série doit être lue. Amelia est un bijou d'ironie et d'intelligence. Lire ses réflexions, ses tirades sont un pur régal. C'est une femme moderne, indépendante, féministe. Pas question de rester tranquillement au salon à boire le thé pendant que monsieur participe à des fouilles. Amelia, ombrelle en main, est de toutes les aventures. Quant à Emerson, comment ne pas être séduite par cet homme bourru mais tendre, spirituel et un brin prétentieux? La relation entre Amelia et Emerson est passionnante. Entre respect, rapport de force, complicité, Elizabeth Peters a crée un couple inoubliable. Je ne me lasse pas de leurs échanges enflammés, de leur répliques cinglantes, mais aussi de leur profonde affection et leur grande estime l'un envers l'autre. J'ai énormément ri. Et ça fait un bien fou.
Sans oublier le cadre! L'Egypte et ses merveilles, le milieu de l'archéologie, la connaissance, le savoir. Cette série est un mélange de détente, d'humour et un bel hommage à la science et la découverte.
Pour ceux qui craignent de se lancer dans une énième série aux tomes trop nombreux, sachez que les romans d'Amelia Peabody peuvent se lire indépendamment. Cependant, il existe une certaine chronologie et je les lirai dans l'ordre si j'étais vous. Vous pouvez laisser plusieurs années entre chaque tome, vous ne serez pas perdus. Désormais je sais, pour ma part, qu'Amelia Peabody viendra régulièrement s’immiscer entre deux lectures. Telle Agatha Christie, elle sera une petite tradition annuelle.
" Les événements que je vais vous relater commencèrent par un après-midi de décembre, jour où j’avais convié Lady Harold Carrington et certaines de ses amies à prendre le thé.Ne vous laissez pas abuser, aimable lecteur, par cette déclaration liminaire. Elle est exacte, certes (comme le sont toutes mes déclarations), mais si vous nourrissez l'espoir de lire un récit de simplicité pastorale, agrémenté de commérages sur la haute société du comté, vous serez cruellement déçu. La paix bucolique n'est point mon élément, et l'organisation de goûters n'est en aucun cas ma distraction favorite. Pour tout dire, je préférerais être pourchassée dans le désert par une bande de derviches sauvages armés de lances et assoiffés de sang. J'aimerais mieux être poursuivie par un chien enragé et contrainte de me réfugier dans un arbre, ou me retrouver face à une momie sortie de son tombeau. J'aimerais mieux affronter des poignards, des pistolets, des serpents venimeux ou la malédiction d'un roi trépassé depuis des siècles.Quitte à être accusée d’exagération, permettez-moi de souligner que j'ai connu toutes ces expériences, à l'exception d'une seule. Remarquez, Emerson a déclaré un jour que si je devais réellement rencontrer une bande de derviches, même les plus pacifiques d'entre eux seraient enclins à me massacrer au bout de cinq minutes, excédés par mes incessantes récriminations. Pour Emerson, il s'agit là d'une remarque spirituelle. "(Incipit, La malédiction des pharaons, Livre de poche, 1981)(Photos : Romanza2016)