Katrina
Sally Salminen
Challenge Myself 2015 - Hiver
J'ai lu, 1971.
Parce que Johan le marin avait les yeux bleus, du charme et la parole facile, Katrina l'a suivi jusqu'à son lointain village de Finlande. Chez elle, elle était fille de riches fermiers, heureuse et préservée : elle découvre qu'il lui faudra vivre dans une misérable chaumière, travailler dur dans des conditions moyenâgeuses, ne compter que sur elle-même puisque Johan a repris la mer et que, de toute façon, c'est un grand enfant ...
J'ai croisé Katrina complètement par hasard un jour où je me baladais à la bouquinerie avec ma mère. Je ne connaissais absolument pas ce classique de la littérature finlandaise. J'ai découvert un sublime roman. J'ai passé des heures intenses de lecture.
Le ton simple, le style sans fioritures et allant à l'essentiel font du bien. L'auteur ne s'attarde pas sur certains détails. Les ellipses sont nombreuses, mais l'ambiance et l'intensité du roman restent intactes. Ce qui n'est pas dit se devine et l'émotion générale n'en est que plus forte. Avec naturel, Sally Salminen arrive à nous projeter dans son monde ... et il est bien difficile d'en sortir. Vents, mer agitée, marins, chaumières, ... Elle nous ouvre les portes d'un univers à la fois sombre et lumineux, triste et plein d'espoir. Nous passons des terres glaciales finlandaises à la chaleur d'un foyer. Katrina ressemble à une histoire de famille narrée au coin du feu un soir d'hiver ... On pourrait s'attendre à un récit purement romanesque, fait de rebondissements et de mystères. Ce serait une erreur. Sally Salminen m'a de nombreuses fois piégée durant ma lecture. Elle prend des directions différentes, part toujours du côté de la simplicité, ne fait pas dans le surplus ou le pathos. Que ce soit dans l'intrigue ou la psychologie de ses personnages, l'auteur n'est jamais là où on l'attend. Je pense notamment au personnage de Johan. Le réalisme de la vie de l'héroïne m'a rappelé certains romans de Zola. Mais là où Emile devient parfois cru, pessimiste et dur avec ses personnages, Sally Salminen choisit la carte de la retenue, de la sobriété, de la lumière.
Mais Katrina n'est pas qu'un roman narrant la vie simple et miséreuse des villageois finlandais. On y trouve aussi un hymne à l'égalité, un appel à la rébellion. Texte engagé et féministe, nous nous insurgeons et luttons auprès de Katrina, cette femme attachante et forte.
Katrina est une histoire d'une force rare. Un magnifique roman, vrai et juste ... jusqu'au dernier mot.
" - Laisse-moi blasphémer alors! Moi, je leur dis qu'ils peuvent bien avoir leur église et leur ciel à eux, ce n'est pas moi qui les dérangerai! Qu'est-ce que tu crois, toi, Bedaa? Tu es une esclave et voilà tout, et ce qui est pire c'est que tu es satisfaite de l'être. des fois; quand ça te prend, tu montres les dents, oui, mais tu trouves que tout est pour le mieux. Je dis que tu as autant les droit que Nordkvist d'être assise en avant, à l'église ou ailleurs, et s'il mange du pain de froment tous les jours de la semaine, toi et tes enfants vous devez en avoir autant. "
(Katrina, S. Salminen, J'ai lu, 1971, p98)