Une odeur de gingembre
Oswald Wynd
Folio, 2011.
En 1903, Mary Mackenzie embarque pour la Chine où elle doit épouser Richard Collinsgsworth, l'attaché militaire britannique auquel elle a été promise. Fascinée par la vie de Pékin au lendemain de la Révolte des Boxers, Mary affiche une curiosité d'esprit rapidement désapprouvée par la communauté des Européens. Une liaison avec un officier japonais dont elle attend un enfant la mettra définitivement au ban de la société. Rejetée par son mari, Mary fuira au Japon dans des conditions dramatiques. À travers son journal intime, entrecoupé des lettres qu'elle adresse à sa mère restée au pays ou à sa meilleure amie, l'on découvre le passionnant récit de sa survie dans une culture totalement étrangère, à laquelle elle réussira à s'intégrer grâce à son courage et à son intelligence. Par la richesse psychologique de son héroïne, l'originalité profonde de son intrigue, sa facture moderne et très maîtrisée, Une odeur de gingembre est un roman hors norme.
Une odeur de gingembre est un roman parfait pour les vacances d'été. Je vous conseille, amis lecteurs-vacanciers, de glisser ce livre dans votre valise avant de partir vous dorer la pilule. Il est simple, efficace, intéressant et accrocheur.
J'ai aimé l'histoire bien mouvementée de Mary Mackenzie. On s'attache à cette héroïne particulièrement humaine. J'ai suivi sa vie en Asie avec plaisir, parfois en tremblant, parfois en souriant, mais toujours avec intérêt. Les pages passent à une vitesse folle et il est très difficile de ne pas enchaîner avec le chapitre suivant après en avoir fini un. Mais je range vraiment ce roman dans la catégorie "détente". L'histoire m'a séduite mais le style, la façon de raconter ne m'ont pas transcendée. C'est un roman qui pour moi n'a pas beaucoup de caractère. Il a un charme fou, on prend énormément de plaisir en sa compagnie, mais certains aspects du texte ont déjà été vus et traités dans d'autres romans. Je trouve qu'Oswald Wynd va trop vite, ne développe pas assez, passe trop rapidement sur certaines périodes de la vie de Mary.
Les premières pages m'ont révélée une héroïne comme je les aime. Mary a un caractère bien trempé sur ce bateau qui l'emmène en Chine ... Pourtant plus les pages passaient, plus certains traits de la personnalité de Mary me gênaient. Mary Mackenzie, bien qu'attachante, semble essayer de ressembler à une héroïne courageuse et inoubliable sans y parvenir. Je l'ai trouvé assez passive au bout du compte. Elle attend que les choses se passent, acceptent ce qu'on lui propose. Ce trait de caractère m'a particulièrement marquée en ce qui concerne ses enfants. Vous allez me dire que pour une femme surtout au début du XXème, il était quasiment impossible de se battre contre les décisions des hommes! Certes. Mais je trouve qu'elle accepte bien vite la situation! A sa place et me sentant impuissante, j'aurai pété un câble, je serai devenue folle ou je me serai jetée par la fenêtre. Je semble bien dure avec la pauvre Mary que pourtant j'ai aimé avec tendresse ... mais que voulez-vous, personne n'est parfait ... je critique trop et Mary pas assez!
J'ai trouvé très intéressante la relation de Mary avec Kentaro, son amant japonais. En lisant la quatrième de couverture, on s'attend à une histoire passionnée d'adultère, d'amour contrarié, mais Oswald Wynd est bien plus subtil. Non, il n'y a pas de déclarations d'amour, de scènes idylliques. Les sentiments sont beaucoup plus complexes et profonds. D'ailleurs existe t-il réellement une seule histoire d'amour dans ce roman? N'est ce pas une antithèse aux romans d'amour?
C'est un livre bien émouvant et qui fait du bien. Une odeur de gingembre est, malgré ses réelles faiblesses, un texte très sensible que l'on lâche qu'avec difficulté une fois commencé. Un bon roman de saison!
" Il m’arrive parfois de penser à ces petits incidents qui semblent sans importance et qui ont changé le cours de ma vie, comme aller chez Margaret Blair et d’y avoir rencontrer Richard, une chance sur dix mille en réalité. Et puis il y a eu cette promenade matinale sur un sentier qui traversait un petit bosquet de bambous et menait à Kentaro. Que des évènements aussi anodins puissent transformer aussi radicalement le cours de ma vie veut-il dire que je suis atteinte d’une espèce particulière de folie ? Les autres bâtissent-ils leur vie sur de tels incidents ? Je crois bien que ne réussissent vraiment dans la vie que les gens à qui il n’arrive rien, et qui planifient leurs jours comme la trajectoire d’un bateau sur une carte, sans jamais qui leur boussole des yeux."
(Une odeur de gingembre, O. Wynd, Folio, 2011)