lundi 23 décembre 2013

C'est utile parfois d'avoir 7 langues de dragon dans sa poche!

Contes choisis
Grimm

Folio classique, 2001.

Les frères Grimm ont rassemblé et publié des contes populaires dont la tradition vivait encore à leur époque dans les pays allemands. Ils ont ainsi fait entrer dans la littérature et dans l'histoire de la pensée de ces petits chefs-d’œuvre. Les principaux étant "Cendrillon", "La Belle au Bois Dormant", "Blanche-Neige", "L'oiseau d'or" et quinze autres. Ces récits décrivent un passage, gêné par mille obstacles, mais qui s’accomplit heureusement à la fin ; ils expriment la nécessité pour l'individu d'évoluer d'un état à un autre, d'un âge à un autre, et de se former à travers des métamorphoses douloureuses, qui ne prennent fin qu'avec son accession à une vraie maturité. Aller de l'enfance à l'état d'homme est une épreuve qui ne peut être surmontée sans une initiation. La fée aide le héros perdu à sortir de l'égarement. Le conte donne ainsi aux enfants, et aux autres, une image d'eux-mêmes, de leur famille, de leurs parents : le merveilleux est dans le quotidien.

Après avoir lu (il y a quelques années) les contes de Perrault et les contes d'Andersen, je me suis plongée dans les contes des frères Grimm. Je me suis vite rendue compte que je connaissais très peu leurs récits et j'ai pris beaucoup de plaisir à les découvrir. Je dois même avouer que je les ai dévoré. Je ne pensais pas lire aussi vite ce recueil, à vrai dire. Je me suis faite attraper par ces histoires magiques et merveilleuses.
J'ai retrouvé certains contes célèbres comme Hansel et Gretel (et j'ai pu constater qu'il me faisait aussi peur que dans mon enfance ... Aahh! le passage de "grignoti, grignoton, qui grignote ma maison" ... bbbrrrr!!), Blanche-Neige, La belle au bois dormant, Cendrillon, Peau de Mille bête (Peau d'âne), ... J'en aussi ai découvert des nouveaux tout aussi passionnants comme Le fidèle Jean, De celui qui partit en quête de la peur,  Les six cygnes, ... J'ai eu la surprise de constater que tous ces contes sont extrêmement gores. Tortures, supplices, morts atroces, mutilations, ... Bref, je ne m'y attendais pas du tout. Mais les frères Grimm ne rentrent pas dans le détail, ils donnent les infos et c'est tout. Donc, les âmes sensibles, ne vous en faites pas, vous pouvez lire ces contes. 
Les histoires sont très courtes, elles se dégustent. Dès les premiers mots, on est embarqué. Un recueil à ouvrir sans crainte, avec confiance. C'est passionnant!
Perrault m'avait surtout séduite pour sa belle langue précieuse, typique de son époque. Ses contes sont assez intellectuels, très moralistes. Andersen (mon chouchou) me touche par sa grande sensibilité, ses histoires très humaines, presque sociales. Il est poétique, mélancolique. Les frères Grimm eux semblent avoir pour but de divertir uniquement. Le style est simple, les contes sont très courts. On les lit pour le plaisir.
Revenir aux classiques, aux sources, fait toujours un bien fou. Surtout quand ils sont succulents et passionnants. 

Avant que j'accède à votre désir, il me faut avoir trois robes, une dorée comme le soleil, une argentée comme la lune, et une brillante comme les étoiles : en outre j'exige un manteau fait de mille peaux et de mille fourrures, pour lequel chaque animal de votre royaume devra donner un morceau de sa peau ... "
(Peau de Mille bêtes, Contes de Grimm, Folio classique, 2001, p188)

(Source image : Hansel et Gretel, wikipedia.org)

samedi 21 décembre 2013

Fais pas ci, fais pas ça!

Fifi Brindacier
Astrid Lindgren

Livre de poche, jeunesse, 2009. 

Avec ses yeux vifs et ses tresses, on pourrait croire que Fifi Brindacier est une petite fille comme les autres. Et pourtant... D'abord, Fifi vit toute seule dans une grande maison avec un cheval et un singe. Ensuite, pour une petite fille, elle est douée d'une force...incroyable! Avec cela, un cœur d'or et une fantaisie sans limite. Pour ses camarades, elle est toujours prête à se dévouer ou à inventer des jeux extraordinaires. Et naturellement, tout le monde adore Fifi Brindacier.

Je suis bien décidée depuis quelques temps à lire les classiques de la littérature de jeunesse que je n'ai pas encore lus. Fifi Brindacier est un titre que j'avais noté depuis un moment. J'ai déjà lu Astrid Lindgren vers 10/11 ans. Il s'agissait de Ronya Fille de brigand. Je ne le recommanderai jamais assez aux jeunes lecteurs. Ce roman m'avait totalement engloutie. J'avais ressenti mes premières vraies émotions de lectrice : tristesse, peur, solitude, deuil, amitié, entraide, ... Il faudrait que je le relise. Ce monde peuplé de nains gris et de brigands est fabuleux. Mettez-le entre les mains de vos enfants! Bref ... Revenons à Fifi.
C'est dans un tout autre style que j'ai retrouvé Astrid Lindgren. L'univers n'est pas sombre comme dans Ronya. Plus léger, plus enfantin, Fifi Brindacier est un roman que tous les enfants adoreront. L'histoire d'une petite fille de 9 ans passant son temps à faire des bêtises ne peut que les passionner. Chapitre après chapitre, on se délecte des péripéties de Fifi. J'ai lu certains passages avec mon fils (de bientôt 3 ans) et il est resté très attentif. Un petit singe, un cheval, un cirque, un pique-nique, ... Il s'en passe des choses dans la vie de Fifi. 
En tant qu'adulte, mon regard sur Fifi est allé au-delà de la simple fascination. Les enfants aiment la voir faire n'importe quoi, ils aiment sa force incroyable et son esprit farfelu. Quant à moi, la situation de Fifi m'a rappelé celle de certains enfants que je croise dans mon quotidien. Fifi n'a pas de règles, de cadres, elle a été élevée de façon marginale, loin des convenances de la société. Lorsqu'elle est en contact avec d'autres personnages, elle est aussi fascinante qu'isolée, écartée, dévisagée. Plusieurs scènes montrent que Fifi ne se rend pas compte qu'elle est mal élevée ou différente. Lorsqu'elle saccage une pause thé ou un spectacle de cirque, elle croit bien faire car elle n'a pas les mêmes normes, les mêmes limites que les autres gens. Elle est en décalage permanent. Elle est ravie dans les dernières pages d'assister à un incendie sans se rendre compte que des vies sont en jeu. Certains moments m'ont renvoyé à mon métier où l'on croise beaucoup d'enfants que l'on n'arrive pas à comprendre, qui font, disent, pensent des choses qui nous paraissent incohérentes et que l'on rabroue car ce n'est pas dans l'ordre des choses d'agir ainsi. Comme le fait la maîtresse du village quand Fifi décide d'aller à l'école. Mais Fifi ne peut agir autrement, elle ne comprend pas, ne se rend pas compte qu'elle agit mal car personne ne lui a jamais dit que telle ou telle chose ne se faisait pas. Je me suis mise à la place de Fifi et j'ai compris ce que pouvait ressentir un enfant auquel on disait mille fois par jour (par exemple) "on insulte pas les autres!" mais qui n'a connu que ça autour de lui depuis sa naissance. 
Il y a vraiment deux lectures dans ce texte et c'est ce qui le rend riche et intéressant. On a une Fifi fabuleuse, acrobatique, drôle et imaginative mais aussi une Fifi qui ne pourra jamais allée à l'école, qui vivra toujours en marge, sera rejetée par certains et toujours vu comme une bête de foire. On est partagé entre sa liberté, son indépendance, son originalité qui la rend si attachante et sa tristesse de se sentir si décalée face aux autres, son manque de repères et d'équilibre. Cet aspect du livre d'Astrid Lindgren est vraiment frappant et passionnant. 
Je vous conseille vraiment de vous plonger dans ce classique enfantin. Vous rirez des réflexions de Fifi et de ses aventures. C'est frais, gai, ça se lit sans faim. Par contre, vous y découvrirez aussi une lecture plus adulte sur la vie d'une enfant marginale et vous vous questionnerez sur l'avenir de ce brin de fille pétillant. Peut-on vivre en marge de la société, sans aucune connaissance des règles et des mœurs? En ouvrant ce texte, je ne pensais vraiment pas me poser autant de questions ... 

Dans la toute petite ville, tout le monde sut rapidement qu'une drôle de petite fille de neuf ans vivait seule à la villa "Drôlederepos". Et les papas et les mamans de la petite ville n'aimait pas du tout, mais alors, pas du tout une chose pareille. Tous les enfants devait avoir quelqu'un qui leur disait ce qu'ils avaient à faire, tous les enfants devaient aller à l'école et apprendre les tables de multiplication. Donc les papas et les mamans de la petite ville décidèrent que la petite fille de la villa "Drôlederepos"devait être immédiatement placée dans un orphelinat, une maison pour enfants. "
(Fifi Brindacier, Astrid Lindgren, Livre de poche, 2009, p37)

(Source image : silvi.over-blog.com)

mercredi 18 décembre 2013

Diantre!

Cranford
Elizabeth Gaskell


Points, Grands romans, 2009.

Au XIXe siècle, le petit village anglais de Cranford vit au rythme des discussions autour du thé et des entorses aux convenances. Au fil des saisons, Mary Smith rend visite à ses amies et connaissances. Elle est ainsi témoin de tous les grands et petits événements qui bouleversent la société de Cranford : deuils, scandales amoureux mais aussi manque d'argent. Car ces dames de bonnes familles se doivent de dissimuler leur pauvreté sous le vernis de l'élégance.

Je dois reconnaître - tristement- que mon premier sentiment lors de ma lecture de Cranford fut la déception. Oui, je le confesse (je ferai 4 Ave et 6 Pater, promis)! 
J'ai adoré Nord et Sud (*soupir*) et j'ai trouvé beaucoup de charme aux Confessions de Mr Harrison, je partais donc toute guillerette dans les aventures de Cranford.  Je ne peux pas trop expliquer ce qui s'est passé dans ma tête. Je crois que, déjà, je m'attendais à un roman dans sa forme la plus basique, alors que Cranford a une construction assez particulière. Au début, on ne sait même pas qui est le narrateur (la tendre Mary se dévoile au fur et à mesure), j'ai eu la sensation d'être télescopée à Cranford assez brutalement, sans préambule, sans introduction. Cranford est composé d'anecdotes. Étrangement (pour une adepte de la blogosphère littéraire et des romans anglais), je ne m'y attendais pas. Du coup, j'ai mis plusieurs pages à me faire à cette construction. J'avais l'impression de passer du coq à l'âne en permanence. Bref, vous l'aurez compris mon emménagement à Cranford ne s'est pas fait en douceur. Puis, progressivement, je me suis liée d'amitié avec les habitantes. Thé après thé, j'ai appris à vivre parmi elles. J'ai surtout été très émue par Miss Mathy, très touchante. Certains passages sont franchement drôles. J'ai beaucoup souri. D'autres au contraire m'ont rappelé Nord et Sud pour leur profondeur, leur force. En quelques mots, Gaskell arrive à rendre un simple moment beau, émouvant, nostalgique : " Miss Matty dénoua le paquet avec un soupir qu'elle s'empressa de ravaler aussitôt, comme s'il était répréhensible de regretter le passage du temps, ou celui de la vie d'ailleurs. Nous convînmes de les lire séparément, en prenant chacune une lettre différente dans le même paquet et en décrivant son contenu à l'autre avant de la détruire. Avant cette soirée, je ne m'étais jamais douté qu'il était si triste de lire d'anciennes lettres et j'aurais été bien embarrassée de dire pourquoi. Car ces lettres débordaient de bonheur - du moins celles qui remontaient le plus loin dans le temps. On y trouvait un sentiment très vif, très intense du moment présent, qui paraissait si puissant, si épanoui qu'on avait l'impression qu'il ne pourrait jamais s'éteindre, que les coeurs chaleureux et vivants qui s'exprimaient ainsi ne pourraient jamais mourir et disparaître pour toujours de la terre ensoleillée. " (p86).
J'ai fini par me régaler des petites aventures de Cranford, à écouter les ragots, à aider les amies. Si je m'étais, dès les premières lignes, attendue à ce style de lecture, j'aurai pris beaucoup de plaisir à lire ce roman. Malheureusement, cela m'a pris du temps et j'ai lu plusieurs pages un peu perdue. 
Cranford est le texte que j'ai le moins aimé de Gaskell  (après avoir lu Nord et Sud et Les confessions de Mr Harrison). Et c'est avec tristesse que je le reconnais. Mais je suis toujours bien décidée à lire les autres romans de cette grande dame de Lettres. Je me replongerai avec bonheur dans son monde sentant bon le Earl grey et les scones. 

" A l'évidence, le sucre était l'économie favorite de Mrs Jamieson,. Je gagerais volontiers que la pince à sucre en filigrane, qui ressemblait plutôt à une paire de ciseaux à broder, n'aurait jamais pu s'écarter suffisamment pour saisir un de nos honnêtes et vulgaires morceaux de taille ordinaire; d'ailleurs , lorsque j'essayai de prendre d'un coup deux des petits morceaux miniatures, afin qu'on ne me vît pas plonger de trop nombreuses fois dans le sucrier, elle en lâcha un d'office, avec un petit claquement sec et une malveillance délibérée. "
(Cranford, Elizabeth Gaskell, Points, 2009)

(Source image : Cranford (BBC) interactive.wxxi.org)

lundi 16 décembre 2013

Noël avant l'heure!


Il y a des matins où, en se levant, on ne s'attend à rien de particulier. On sort doucement du brouillard, on prend plaisir en se disant que notre petit d'Homme ne nous a pas réveillé cette nuit (Aah! les joies de la varicelle), on s'installe pour le petit déjeuner traditionnel accompagné du roman du moment (avec une pause préparation du mini déj' du petit d'Homme nommé plus haut) ... On se prépare, on se conditionne pour aller travailler. Et là, la sonnerie retentit. 10 sec pour demander au chien de bien vouloir fermer sa g****e et enfin on entend le postier qui nous dit : "un colis pour vous!". Bon ... On descend (zut, pas fini de m'habiller, j'ai encore le bas de pyjama!), on signe, on remercie (avec dignité même si on est en bas de pyjama). Et là, on cogite. Qui nous envoie un colis? Est-ce que j'ai commandé quelque chose? Le prénom me dit quelque chose, le nom de famille rien! Et ça y est ... On comprend! On commence à être euphorique, on n'y croit pas, on se dit que franchement la vie est belle. Un petit colis comme ça, pour rien, juste pour faire plaisir, pour le bonheur de surprendre quelqu'un et de lui illuminer sa journée. Merci Lou! Je suis touchée et émue. C'est une belle attention, un geste délicat ! Et c'est avec amitié que je te crie un grand merci! La blogosphère crée de belles rencontres. 

Vu que c'est Noël dans quelques jours, je n'ai rien ouvert (enfin j'ai ouvert le colis tout de même ... où le thé Mariage Frères, le marque page et le carnet Actes Sud n'étaient pas emballés!!). J'ai lu la carte aussi, mais le reste, j'ai caché ça dans un tiroir pour le soir du réveillon. Et vu que je suis très méchante, vous serez, vous aussi, obligés d'attendre Noël pour savoir ce que cachent ces jolis paquets! 

Bonne journée à tous!

dimanche 8 décembre 2013

L'Homme n'est que désir ...

Brûlant secret et autres nouvelles
Stefan Zweig

 France loisirs, 2009.

Comment le désir et la passion, enracinés au fond de chaque être, peuvent le révéler à lui-même et bouleverser son destin : tel est le secret que tentent de percer les quatre récits qui composent ce volume. L'éveil de la jalousie chez un garçon de douze ans, qui a innocemment rapproché sa mère et le jeune vacancier oisif dont l'amitié l'emplissait de fierté ; la dérive nocturne d'un homme qui découvre au contact des voyous et des prostituées une part inconnue de lui-même ; le mystère d'une jeune femme qui se donne sans vouloir révéler son identité; la rivalité de deux soeurs, l'une religieuse et l'autre courtisane : dans des situations très diverses, l'auteur de Vingt-quatre heures de la vie d'une femme explore avec audace des sentiments troubles et fascinants, témoignant d'une absolue maîtrise de son art de romancier.

Dans ce recueil de quatre nouvelles (Brûlant secret, Conte crépusculaire, La nuit fantastique, Les deux jumelles), Zweig a développé un point de sa personnalité qui, jusqu'à maintenant, m'était que légèrement apparu : sa sensualité. Les quatre nouvelles traitent du désir. Ce dernier est parfois frustré, mais aussi brutal, mystérieux, animal, passionné, dépravé. Nous croisons des personnalités différentes, luttant avec leurs secrets et leurs angoisses, mais qui se retrouvent à un moment de leur vie face à un choix, un doute, une révélation impliquant leurs désirs, leur sensualité, leurs émotions. 
Brûlant secret m'a énormément rappelé Vingt quatre de la vie d'une femme, texte sublime de Zweig. Cette histoire de femme prisonnière de sa vie et de ses devoirs qui se laisse tenter par l'infidélité et le déshonneur est bouleversante. La relation que cette femme entretient avec son fils est complexe, elle remue les tripes, chamboule, déconcerte. Zweig dans toute sa splendeur. 
La seconde, Conte crépusculaire, possède une ambiance particulière. Une femme se livre à un homme la nuit sans jamais dévoiler qui elle est. C'est beau, humain, troublant.
La nuit fantastique est la nouvelle que j'ai trouvé la moins passionnante et pourtant, je pense qu'elle est la plus approfondie. Le héros est assez antipathique. Heureusement, la plume de Zweig, toujours aussi sublime, m'a permise tout de même de me laisser aller dans cette étrange aventure d'une nuit.
La dernière, Les deux jumelles, se dévore. Écrite sous forme de légende, on découvre un Zweig presque grivois, contant les péripéties de deux sœurs peu pudiques. Son but est de divertir et ça marche. 
Comme toujours, j'ai été attrapée. Zweig a su me captiver. Et son écriture! Que dire? Même fatiguée, déconcentrée, la tête ailleurs, il arrivait à m'agripper en trois mots. N'importe laquelle de ses phrases, même lue hors contexte, est un délice de poésie, d'humanité, de psychologie, de sensibilité. Décidément, un grand monsieur. 

" La locomotive fit entendre un rauque sifflement : on était arrivé au Semmering. Pendant une minute les noirs wagons stationnèrent sous la lumière faiblement argentée du ciel ; ils rejetèrent un mélange de personnes et en avalèrent d’autres. Des vois nerveuses résonnèrent çà et là, puis la machine siffla de nouveau et entraîna bruyamment la chaîne sombre des wagons dans la gueule du tunnel. Et la paix recommença à régner sur le vaste paysage aux clairs arrière-plans balayés par le vent humide."
(Brûlant secret, Stefan Zweig, France Loisirs, 2009)

(Source imgae : baudelet.com. Gustave Caillebotte, Femme à sa toilette)

mercredi 4 décembre 2013

.....

Je vous souhaite un bel hiver ...


... rempli de lectures passionnantes, de thés réconfortants, de paysages enneigés, de balades, de joues rouges, de chocolats chauds, de pâtisseries, ....

Dévorons des pages blotties dans un plaid au coin d'un feu, plongeons dans des aventures littéraires palpitantes, .... Vibrons, pleurons, rions, .... 

Bel hiver tout en lecture.

mardi 3 décembre 2013

Une vie bien remplie

Des femmes remarquables
Barbara Pym

10/18, 1996.

Des femmes remarquables passe, en Angleterre, pour l'un des meilleurs crus, et à juste titre. Mildred Lathbury, qui s'épuise elle-même par son excès de vertu et contemple avec consternation les reflets gris et ternes que lui renvoient les miroirs du presbytère trop assidûment fréquenté, est l'un des personnages paradoxalement les plus réussis de Barbara Pym. Son drame ? Etre une chic fille qui sait prêter aux autres une oreille trop aisément compatissante et qui a toujours une bouilloire sur le feu pour le thé quand on sonne à sa porte. 

Voilà un petit roman frais, agréable et au charme délicat ... Je n'avais jamais ouvert de romans de Barbara Pym, plume britannique considérée soit comme talentueuse soit comme complètement ennuyeuse. C'est chose faite et j'ai été conquise. J'ai trouvé ça "douillet", drôle, tendre et fin. Ceux qui désirent des aventures rocambolesques, des meurtres, du sang et du sexe, passez votre chemin. Ici, on parle de thé, de tricot et de ragots. J'étais très confortablement installée dans le petit monde de Pym cette semaine, et ce fut une jolie expérience. Mildred est un personnage qui m'a énormément faite rire. Ses répliques, ses réflexions, son autodérision sont excellentes : "Nos plateaux s'entrechoquant défilaient à une vitesse vertigineuse, si bien que je finis par me retrouver nantie d'un assortiment de mets que je n'aurais jamais choisis si j'avais eu une minute de réflexion " (p100) ; "Je songeai, non sans tristesse, que c'était excatement le genre de lingerie susceptible d'appartenir à une femme de mon genre, aussi se passe t-elle de description" (p 110) ; "Bien des histoires d'amour ont dû être étouffées dans l'oeuf par le spectacle d'un vis-à-vis affairé à manger des spaghettis. " (p124). Outre son humour, Mildred m'a émue. Je n'ai pas senti qu'elle était triste d'être célibataire. Elle revendique le droit à l'indépendance et aime le petit monde solitaire qu'elle a crée. Par contre, j'ai ressenti le poids de la société autour d'elle, ces gens qui sont en permanence en train de lui chercher un mari ou qui la plaignent d'être dans une situation si peu enviable. Le manque de choix de la femme se ressent douloureusement : se marier ou être considérée toute sa vie comme une vieille fille un peu inutile. 
Un roman que j'ai ouvert toujours avec le sourire. Simple, doux, sans prises de tête, mais intelligent et profond. Une ambiance anglaise tout simplement succulente. Je n'en ai pas fini avec Mrs Pym ... C'est sûr! J'ai déjà hâte d'ouvrir un autre de ses textes. Une belle découverte! 

" Je me dis qu'après tout, la vie se réduisait, pour la plupart d'entre nous, à des détails de cet ordre : les petits désagréments plus que les grandes tragédies, les dérisoires petites envie plus que les grands renoncements et les tragiques passions amoureuses de l'histoire ou des romans. "
(Des femmes remarquables, Barbara Pym, 10/18, 1996)

(Source image : portrait of Dolly Stiles sur en.wahooart.com))