L'enchanteur
René Barjavel
(Défi Au délà des mots 2008/2009)
Folio, 2005.
Qui ne connaît Merlin ? Il se joue du temps qui passe, reste jeune et beau, vif et moqueur, tendre, pour tout dire Enchanteur. Et Viviane, la seule femme qui ne l'ait pas jugé inaccessible, et l'aime ? Galaad, dit Lancelot du Lac? Guenièvre, son amour mais sa reine, la femme du roi Arthur ? Elween, sa mère, qui le conduit au Graal voilé ? Perceval et Bénie ? Les chevaliers de la Table Ronde ? Personne comme Barjavel, qui fait le récit de leurs amours, des exploits chevaleresques et des quêtes impossibles, à la frontière du rêve, de la légende et de l'Histoire. Dans une Bretagne mythique, il y a plus de mille ans, vivait un Enchanteur. Quand il quitta le royaume des hommes, il laissa un regret qui n'a jamais guéri. Le voici revenu.
Aaaaahh!!! La légende d'Avalon! Une merveille! Elle me fait tant rêver, tant voyager. Ses histoires d'amour, de haine, de dieux, d'épées, de trahisons, d'amitié.
Ma première approche littéraire fut Les dames du lac de Marion Zimmer Bradley qui reste un de mes coups de coeur à vie. Puis, il y a eu les cours d'ancien français à l'université et ma découverte des textes médiévaux surtout ceux de Chrétien de Troyes et les lais de Marie de France. Arthur et sa table ronde, tous ces chevaliers valeureux, ces dames amoureuses, ces sentiments les plus purs, les plus authentiques de l'esprit humain comme la peur, l'amour, la folie, la douleur, ...
Je connais L'enchanteur depuis des années. Ce roman est le livre préféré de mon frère cadet. Il l'a lu très jeune et je crois qu'il a passé plusieurs heures de son temps à m'en parler. Du coup, j'ai acheté ce livre il y a longtemps. Pourtant, je ne l'avais toujours pas lu. Je n'ai aucune explication. Enfin, bref, maintenant c'est fait!
Je peux vous dire que j'ai adoré! J'aurai pu lire ce roman en une journée (si mes occupations personnelles ne m'en avaient pas empêchée) car il se lit tout seul. Il fait presque 500 pages et pourtant tout coule si bien que les pages défilent et on est épaté par la rapidité avec laquelle on lit. C'est vraiment surprenant!
Il existe énormément de version sur la légende d'Avalon. Pour certains, Morgane et Arthur ont eu une relation incestueuse, pour d'autres, c'est avec son autre soeur. On dit aussi que c'est Nimue et non Viviane la femme amoureuse de Merlin. Bref! Chacun a sa version! Je dois avouer que celle de Barjavel m'a énormément séduite. Elle me paraît même assez proche des textes de Chrétien de Troyes. J'ai retrouvé avec joie les scènes phares de la légende ainsi que ses personnages mythiques. J'ai trouvé aussi une écriture sublimement poétique, teintée d'humour et d'humanité. Barjavel m'a à la fois fait pleurer, rire, trembler, soupirer, aimer et détester. C'est une bien belle version qu'il nous offre là. 500 pages de bonheur, de magie pure, de romance et de plaisir littéraire.
J'ai vécu de merveilleux moments qui m'ont donnée envie de découvrir d'autres versions, de me replonger aussi dans les textes de Chrétien de Troyes que je n'ai pas encore lus, ... Bref! de continuer à courir après le Graal, d'aimer à nouveau Perceval, Lancelot, Galaad, Arthur, Merlin et de vivre tous ces belles aventures à la fois humaines et fantastiques ...
...
"Viviane avait dit : « les pouvoirs je m'en moque ! », mais ce n'était pas vrai. Elle s'en rendit compte très vite, dès que Merlin lui eût révélé quelques autres des possibilités qui dormaient en elle. Ce n'était pas qu'elle attachât beaucoup de prix à chacune. Faire apparaître sur elle des vêtements splendides et des bijoux somptueux, déplacer un arbre ou une maison, transformer une prairie en désert ou en fleuve, marcher sur l'eau, voler, faire d'un cheval une vache ou un tonneau, se déplacer instantanément d'un lieu à un autre, c'était autant de jeux, mais rien de plus. Ce qui était important, c'était le changement que cela apportait en elle. Disposant de plus en plus, de mieux en mieux, de la matière, de l'espace et du temps, elle s'élevait au-dessus de la condition humaine ordinaire, elle montait dans l'échelle des êtres. Il serait très dur de renoncer à cette ascension. Et elle n'était pas sûre d'en avoir le droit. Elle sentait vivre en elle encore une multitude de possibilités, qui se bousculaient pour qu'elle les connût et les utilisât. Elle voulait les savoir toutes ! Elle harcela Merlin à chaque minute de la semaine qu'il resta auprès d'elle. Il s'en allait le soir, il ne voulait pas passer la nuit avec elle dans son lit, comme elle le lui demanda : elle aurait été si heureuse de dormir dans ses bras... Sa jeunesse lui permettait de n'être pas encore tourmentée par l'interdiction qui leur était faite d'accomplir totalement leur amour. "
(L'enchanteur, Barjavel, Folio, p82)
(Source image : blog.actoweb.com)