jeudi 22 août 2013

Et ben, Bonne Mère!

Jean de Florette
L'eau des collines tome 1
Marcel Pagnol

Editions de Fallois, 2005.

Au village des Bastides Blanches, on hait ceux de Crespin. C'est pourquoi lorsque Jean Cadoret, le Bossu, s'installe à la ferme des Romarins, on ne lui parle pas de la source cachée. Ce qui facilite les manœuvres des Soubevran, le Papet et son neveu Ugolin. qui veulent lui racheter son domaine à bas prix... Jean de Florette (1962), premier volume de L'Eau des collines, marque, trente ans après Pirouettes, le retour de Pagnol au roman. C'est l'épopée de l'eau nourricière sans laquelle rien n'est possible. Marcel Pagnol y développe l'histoire du père de Manon, évoquée sous forme de flash-back dans le filin Manon des sources (1952). Les dialogues sont savoureux, et la prose aussi limpide que dans les Souvenirs d'enfance. Quant au Papet et à Ugolin, à la fois drôles et terrifiants, ils sont parmi les créations les plus complexes de Pagnol.

Les films La gloire de mon père et Le château de ma mère ont bercé mon enfance. Une fois par an, comme un rituel, nous nous installions devant la télévision en famille pour regarder ces deux sublimes films tirés de Marcel Pagnol. J'aimais les paysages, l'accent, le chant des cigales et cette nostalgie, cet amour de l'enfance et de ses merveilles qui planaient tout le long des films. Je n'avais pourtant jamais ressenti le besoin, l'envie d'ouvrir un de ses textes. Jusqu'il y a quelques temps ... 
En ouvrant Jean de Florette, j'ai retrouvé un peu de tout ce qui faisait le charme des films. Le thème de l'enfance est peu présent, c'est un roman plus "adulte". Mais les sons, les musiques, les parfums étaient eux bien présents. Et c'est un régal!
En plus d'une envoûtante ambiance, d'un univers captivant, j'ai découvert une plume sensible, très drôle et fine. Marcel Pagnol aime les gens avec leurs faiblesses et leurs défauts, et ça se sent. Il se dégage de son écriture une simplicité, un naturel, un amour de l'être humain et de la nature totalement merveilleux.
L'histoire m'a touché. Jean de Florette m'a émue. J'ai cru en son rêve, même si je savais que c'était perdu d'avance. Le Papet m'a terrifié et Ugolin, intrigué. Jean de Florette nous offre des personnages plus complexes qu'ils n'y paraissent. Ce roman soulève, sous une apparente simplicité, de profonds questionnements. J'ai retrouvé un peu de ce qui me plaît tant dans Michel Tremblay. Des vrais sentiments, des histoires de Monsieur et Madame Tout-le-monde qui deviennent des amis, des proches, des petites tragédies sans sang ni meurtre. Jean de Florette nous rappelle les choses essentielles de la vie, telles que l'importance de la pluie, le travail bien fait, la confiance en soi, la douceur d'un rayon de soleil, le plaisir d'être en famille. 
Une très belle découverte. J'ai déjà commencé le tome 2 Manon des sources qui m'a l'air tout aussi délicieux avec, en prime, un côté un peu plus féminin que Jean de Florette et qui n'est pas pour me déplaire. 

" Tu comprends, s'ils avaient bu l'eau de la citerne, c'est sûr qu'ils seraient morts tous les trois, et moi ça m'aurait embêté. D'avoir bouché la source, c'est pas criminel : c'est pour les œillets. Mais si, à cause de ça, il y avait des morts, eh bien peut-être qu'après nous n'en parlerions pas, mais nous y penserions. "
(Jean de Florette, Marcel Pagnol, Editions de Fallois, 2005)


(Source image : art-figuration.blogspot.com)

dimanche 18 août 2013

Mini partage




La bouquinerie de ma modeste ville a accueilli hier après-midi Delphine Cingal, Maître de conférence à Paris II et spécialiste de littérature policière. Elle est venue pour une petite "causerie" organisée par l'association du bouquiniste et ayant pour thème : Histoire et techniques du roman policier, ou l'assassinat considéré comme l'un des Beaux-Arts.

Aaah! Le bien que ça fait de replonger durant 2 petites heures dans une ambiance universitaire ... Et chapeau à Mme Cingal qui a du, en peu de temps, retracer l'Histoire d'une littérature qu'elle étudie depuis des années. Ces deux heures étaient passionnantes, bien trop courtes à mon goût et je suis partie avec plusieurs titres en poche bien décidée à y mettre le nez.

Je viens vous parler en deux mots de ce qui s'est dit lors de cette "causerie". Sachant que je n'ai pris aucune note, je vous annonce tout de suite que ce petit compte-rendu ne mettra pas du tout le travail de Delphine Cingal en valeur, reprendra à peine 10 % de ce qui a été dit et ne sera pas du tout digne d'une ex-étudiante en Lettres ...  Mea culpa. Mais bon, je tenais tout de même à vous donner quelques références données durant l'entretien et que j'ai noté avec intérêt. 
Delphine Cingal donne envie de lire ... et c'est une bien grande qualité pour un professeur de littérature.

Je ne suis pas, comme on dit, une amatrice de romans policiers. Je les ai découvert sur le tard. Mais j'aime énormément quelques auteurs que je lis très régulièrement, comme un rituel. J'aime les "vieux" policiers : Agatha Christie, Conan Doyle, Maurice Leblanc, ... Et très rarement, je me laisse tenter par des auteurs contemporains. Je n'aime pas le sanglant et le gore, j'aime les romans à énigmes, à secrets. Bref, j'étais assez contente de me rendre à la mini-conférence de Mme Cingal car je n'y connaissais rien en Histoire de la littérature policière et je n'ai pas du tout abordé le sujet en fac' de Lettres. Delphine Cingal nous a fait, cela va sans dire, un résumé de cette Histoire riche et passionnante, mais j'ai tout de même enrichi un peu ma culture et j'en suis ravie.

Delphine Cingal a commencé par remettre les choses au clair. Non, Sophocle n'écrit pas de policiers et le meurtre d'Abel dans la Bible n'est pas le début du roman à suspense. Le roman policier comme genre est bel et bien apparu au XIXème siècle ... pas avant. Etant professeur d'anglais également, Delphine Cingal a principalement parlé de littérature française et anglo-saxonne.
Le 1er roman policier est écrit par Edgar Allan Poe avec Double assassinat dans la rue Morgue. Un mystère doit être résolu, un enquêteur essaie de dénouer les nœuds, le genre est lancé. 
Les romans policiers anglais et français n'ont pas les mêmes héritages. Le style diffère. Les anglais sont influencés par la littérature gothique, ainsi notre cher W. Wilkie Collins devient réellement le 1er écrivain de roman policier anglais avec son célèbre Pierre de lune. En France, nous sommes des héritiers du naturalisme. Les romans sont plus réalistes. On peut citer Gaston Leroux par exemple. 
Mme Cingal a cité aussi Dickens qui, influencé par Wilkie Collins, a écrit (mais jamais fini) le célèbre Mystère d'Edwin Drood. Dans ces maîtres fondateurs, Delphine Cingal a également présenté une femme. Essentielle, selon elle, cette femme est quasi inconnue en France. Je pensais connaître de nom de la dame en question et non. Il s'agit d'Anna Katharine Green. Elle n'est pas traduite en France, ce qui est pour Mme Cingal, un scandale. A.K Green a énormément influencé Conan Doyle et offre des romans apparemment passionnants. Pour ceux qui lisent en anglais, on les trouve très facilement. Je vous envie. Elle m'a énormément donné envie de connaître cette plume. 
Plus tardivement, une autre femme mérite notre intérêt : Dorothy Sayers. Moderne, militante, cultivée, une dame de Lettres que j'ai très envie de découvrir. Un de ses romans a été traduit : Le coeur et la raison. Son meilleur paraît-il. 



Début du XXème siècle, le roman dit noir apparaît. Les règles établies du roman policier commencent à se briser. Le meilleur exemple est Le meurtre de Roger Ackroyd de Madame Agatha Christie. Delphine Cingal m'a révélé la fin de ce roman que je n'avais pas encore lu, mais tant pis, cet exemple montre bien la rupture avec les codes du roman policier traditionnel par le choix du narrateur. 
Le plus marquant en France selon Mme Cingal est Pierre Véry. Elle a un amour profond pour cet auteur et son enthousiasme est communicatif. Je ne connaissais pas cet auteur souvent adapté au cinéma. 
Chez les contemporains, les styles sont flous. Le roman noir empiète sur le roman à suspense. Les frontières s'effacent. 
Fred Vargas est l'une des meilleures plumes actuelles selon Delphine Cingal. Elle aime ausi la folie de Jasper Fforde. Et elle retient deux gros coups de coeur : L'enfant aux cailloux de Sophie Loubière et surtout L'angle mort d'Ingrid Astier.



Delphine Cingal ne cache pas sa préférence pour les romans policiers assez intellectuels faisant référence à d'autres textes ou le suspense et l'enquête sont subtiles et intelligents. Le gore ne lui plaît pas. 
Elle a fini par nous parler de P D James qui fut le sujet de sa thèse. Elle regrette néanmoins le dernier, La mort s'invite à Pemberley. Passionnée de Jane Austen et amoureuse de P.D James, elle trouve que les deux ensemble sont tout simplement incompatibles. 



Je ne voulais pas vous résumer la "causerie" de Delphine Cingal, je désirai juste vous donner quelques références qu'elle a su très bien vendre. C'est une personne passionnée et passionnante que j'ai eu plaisir à rencontrer. 
J'espère vous avoir permis de noter quelques titres ... 
Je regrette de ne pas avoir pris de notes ... J'aurai pu vous faire un "vrai" exposé de ce beau et intéressant moment. 

samedi 17 août 2013

Le tag des 11 !!

Titine m'a obligé (avec multiples menaces) à répondre à un petit tag ... Alors je me lance!


Les règles du jeu sont les suivantes :
- Poster les règles du tag sur sa page
- Décrire onze choses à propos de soi
- Répondre aux onze questions posées et en créer onze nouvelles pour les personnes taguées
- Taguer onze personnes et faire un lien vers leurs blogs
- Prévenir les onze personnes qu’on a taguées.
Onze choses à propos de moi :
1 - Je suis une accro du chocolat. Je pense même que le traditionnel café d'après repas n'est qu'une excuse pour manger un carré de chocolat. Je ne peux pas m'en passer. 
2 - Je fais de la danse classique et néo-classique depuis 18 années. Je dansais encore (un peu) à 8 mois de grossesse. La danse est essentielle dans ma vie, je lui dois beaucoup. Dans mes cours de danse, j'ai appris la rigueur, l'humilité, les émotions les plus pures, l'amitié au-delà de tout, les déceptions, l'angoisse, la joie ... Tout!
3 - Après ma licence de Lettres modernes, j'ai fait une année de Master Littérature civilisation langage. Mon mémoire (que j'ai validé) portait sur la représentation de la famille dans Une double famille de Balzac. J'ai fait le choix de ne pas poursuivre mes études (Master 2) et de me lancer dans ce qui est aujourd'hui ma vocation : l'éducation dite "populaire". Mais j'ai adoré l'université. Les cours me manquent énormément. J'ai passé 4 ans tout simplement sublimes, riches, passionnants. 
4 - Je tiens un répertoire où tous mes romans sont inscrits. Dès qu'un nouveau prend place dans ma bibliothèque, je le note. Dès que j'en lis un, je le surligne. Je le feuillette pour y choisir mes prochaines lectures. 
5 - Je suis intimement persuadée que les livres sont pour moi au-delà d'une simple passion. Il ne se passe pas une journée sans que je lise, sans même que je pense à mon roman en cours, au prochain que j'ouvrirai, à ceux que je veux m'offrir ... Mes amitiés se forment souvent grâce à la littérature, je me réfugie dans les livres, mes souvenirs littéraires sont aussi forts que mes souvenirs "réels" ... 
6 - Je me suis mariée avec le papa de mon petit garçon au mois de juin dernier.
7 - J'adore le moment du petit déjeuner. Depuis toujours, je mets mon réveil plus tôt que la plupart des collègues (ou camarades de classe à l'époque) pour le seul bonheur de déguster mon petit déj' ... avec un bouquin. Je ne changerai jamais cette habitude. Cet instant fait parti des petits plaisirs de la vie. Je sacrifie avec plaisir quelques minutes de sommeil pour ce moment à moi. 
8 - Mon rôle de maman a donné un sens à ma vie. Cette expression assez banale et culcul (disons-le) est devenue pour moi très vraie. Ma vie a pris une autre saveur depuis l'arrivée de mon Romanzino. J'aime m'occuper de mon fils, jouer avec lui, lui faire découvrir le monde, lui lire les histoires qui m'ont touchées enfant, ... Je me régale. J'aime l'éducation et les questionnements que ça suscite. Et j'aime aussi mes moments à moi qui sont devenus plus rares, donc plus précieux. Je les savoure davantage. J'ai arrêté de me regarder le nombril et la vie n'en est que plus belle. 
9 - Je suis malade en voiture. C'est terrible! ça va mieux depuis l'âge adulte, mais enfant, c'était invivable. Le mal des transports est vraiment difficile à vivre : bouffées de chaleur, troubles de la vision, nausées qui durent plusieurs heures après le voyage, ... 
Le bonheur, quoi!
10 - Je suis une grande rêveuse (comme tous les gens aimant lire, je pense) et je me surprends plusieurs fois par jour à imaginer des personnages de romans dans la rue, à revivre dans ma tête une scène de livre ou de film que j'ai aimé. Je me crée mille histoires et je m'endors ainsi le soir, en me réfugiant dans ma "tête". Je ne pense que très rarement à ma journée ou à mes soucis, la plupart du temps, lorsque je me couche, je revis une scène de Jane Eyre, la suite des aventures de Lizzie et Darcy ou, comme en ce moment, je me vois dans la garrigue avec les héros de Pagnol. 
11 - J'aime l'automne et l'hiver. Le retour des teintes orangées, du givre sur les vitres, des rouge-gorges, des châtaignes et bien sûr, des pauses lecture/thé enveloppée dans un plaid près de la cheminée sont pour moi de vrais petits bonheurs.
Les 11 questions de Titine :
1- As-tu toujours aimé lire ?
Oui et mille fois oui. 
J'ai toujours eu des livres autour de moi. Mes parents ne sont pas de très grands lecteurs, mais ils aiment lire et croient au pouvoir des mots. Ils ont toujours laissé une place importante aux livres dans leur vie. Du coup, j'ai feuilleté et lu des livres dès mon plus jeune âge. J'ai toujours eu mon rituel de lecture le soir. Et au début de l'adolescence, j'ai commencé à lire davantage et à avoir mes premiers "éblouissements".  
2- Si tu étais Thursday Next, dans quel livre souhaiterais-tu entrer ?
Question difficile! 
Mais je pense que j'aimerai visiter Thornfield et rencontrer Mr Rochester.
3- Quelle ville a pour toi le plus fort potentiel littéraire ?
Oh! Dur! Plus que des villes, je dirai que beaucoup de lieux ou d'ambiances me donnent envie de lire. Un café parisien, le bord d'une rivière, un jardin, un parc, une plage, .... 
4- Avec quel détective souhaiterais-tu suivre une enquête ?
Euh ... Hercule Poirot. Même si je pense qu'il m'énerverait vite à tout trouver tout le temps. 
5- Quel livre n’est pas assez connu à ton goût ?
La mère de Pearl Buck. Et tous ses autres romans qui tombent de plus en plus dans l'oubli.
6- Quel livre n’arrives-tu pas à finir ?
ça date du collège, ce n'est peut-être plus d'actualité, mais je dirai tout de même Les mémoires d'Outre Tombe
7- Quel auteur, lu il y a longtemps, t’étonnes-tu de ne pas avoir relu depuis ?
Je sèche. Les auteurs que j'apprécie, j'aime les relire régulièrement. 
8- Quelle est votre héros(ïne) préféré(e) de Shakespeare ?
Ophélie. Sa folie me touche.
9- Pour le moment, quel est ton coup de coeur de l’année ?
J'ai apprécié et aimé pas mal de roman, mais je dirai Miss Mackenzie de Trollope. 
10- Liseuse or not liseuse ?
Not liseuse. Je ne juge nullement ceux qui l'utilisent, loin de là, mais pour ma part, je m'y refuse catégoriquement. Je ne suis pas du tout tentée, ça ne me donne aucunement envie. L'apparence de l'objet, son manque de charme, d'histoire, de personnalité sont pour moi incompatibles avec le plaisir de la lecture. 
11- As-tu une autre passion en dehors de la lecture ?
La danse ... mais aussi, la nature, la musique, le dessin, ... 

Voici mes 11 nouvelles questions (pardon si elles ont déjà été posées quelque part .... ) :
1 - Fais-tu une collection? (A part les romans!!)
2 - As-tu un auteur que tu adorais avant et que tu ne lis plus du tout aujourd'hui? Et pourquoi?
3 - Regardes-tu souvent la télévision?
4 - T'imagines-tu parfois en héroïne de roman? (Allez, avoue! Tu t'es déjà vu en Lizzie, non?)
5 - Cornes-tu les pages d'un livre?
6 - Lecture aux toilettes? 
7 - Le meilleur endroit pour lire chez toi est ...
8 - Cites-moi un personnage de roman que tu détestes profondément.
9 - Quel est le personnage de roman qui pourrait devenir ton ami(e) dans la vie?
10 - Tiens-tu des carnets, cahiers, répertoires et autres accessoires en lien avec tes lectures?
11 - Emissions littéraires? Cours du Collège de France? Livre audio? Déclines-tu ton amour des livres autrement que par la lecture?

Je jette mon dévolu sur (en espérant que vous n'êtes pas déjà tagué) : Lili ; Deuzenn ; Emily ; MissLéo ; Cléanthe ; Lou ; Karine ; Aelys ; Shelbylee ; Bianca et Adalana

dimanche 11 août 2013

L'urgence de vivre

Ecoute la pluie
Michèle Lesbre

 Sabine Wespieser, 2013.

Avant que le vieil homme ne se jette sur la voie en lui adressant son dernier sourire, la narratrice partait rejoindre l’homme qu’elle aime à l’hôtel des Embruns. Le choc a fait tout basculer. Plutôt que d’aller à la gare, elle s’enfonce dans les rues de Paris pour une longue errance nocturne sous l’orage. Revenue chez elle au petit matin, toujours incapable d’expliquer à son amant pourquoi elle n’était pas au rendez-vous, elle murmure à son intention le récit de sa nuit blanche. Lui, le photographe pour qui les mots ne sont jamais à la hauteur, sera-t-il capable de comprendre ... 

ça y est! Enfin! Premier "vrai" plaisir littéraire depuis 1 mois
Je me suis posée hier soir avec le petit roman de Michèle Lesbre et je ne l'ai refermé qu'une fois fini. Et ça fait un bien fou après ces semaines à vide. 
J'ai découvert Michèle Lesbre l'année dernière avec son touchant Nina par hasard. J'avais été, sans m'y attendre, totalement transportée et émue aux larmes. J'avais découvert une plume sensible et délicate que j'avais bien l'intention de relire. 
J'ai eu une petite appréhension en ouvrant Ecoute la pluie. Quand on relit un auteur une seconde fois après un coup de coeur, on a toujours peur d'être déçu. Et puis, ces derniers jours, mes lectures me décevaient beaucoup et j'avais peur de passer encore à côté d'un roman. Et non. La magie a opéré dès les premières phrases. 
Il y a un petit côté Lettre d'une inconnue dans Ecoute la pluie. Et ceux qui connaissent mon profond amour pour Zweig comprendront que cette comparaison est, venant de moi, plus que flatteuse.  Le côté "confidence", l'écriture intime et profondément mélancolique m'a rappelé ce texte inoubliable de Zweig. L'intrigue, par contre, n'a rien avoir. Je l'ai trouvé extrêmement touchante. J'ai compris la narratrice, incapable de poursuivre sa vie normalement après avoir croisé le regard du vieil homme. J'ai aimé le message de Michèle Lesbre, la soif de vivre. Heureusement que les romans sont là pour, de temps en temps, nous faire une petite piqûre de rappel ... qu'il est bon de vivre!
Je ne saurai exactement comment expliquer ce qui me touche tant dans les romans de Michèle Lesbre. Peut-être suis-je comme l'amant de l'héroïne qui trouve toujours que les mots ne sont pas à la hauteur? Mais elle possède cette humanité, cette profonde compréhension de l'Homme, cette absence de jugement, cette poésie de l'écriture qui me fascinent tant à la lecture d'un roman. 
Je n'en ai décidément pas fini avec cette sublime plume. Moi, l'amoureuse des classiques, j'arrive parfois à trouver des petites perles dans la littérature contemporaine ... Et j'en suis ravie! 

« Puis le ronflement sourd de la rame qui s’approchait à grande vitesse a provoqué un frémissement parmi les rares voyageurs. Le vieil homme s’est tourné vers moi avec toujours ce sourire limpide, j’ai cru qu’il allait me demander quelque chose, mais il a sauté sur les rails comme un enfant qui enjambe un buisson, avec la même légèreté. »
(Ecoute la pluie, M. Lesbre, Sabine Wespieser, 2013, p 11)

(Source image : betsabeth.overblog.com)

samedi 10 août 2013

Bon ... ça commence à bien faire là!

La ballade et la source
Rosamond Lehmann

Livre de poche, 1955.

Rebecca se lie d'amitié avec Maisie, sa voisine plus âgée qu'elle de quelques années. Avec sa soeur, Rebecca passe du temps dans le jardin du Prieuré, lieu habité par Mrs Jardine, la grand-mère de Maisie, personnage intimidant, provoquant autant d'admiration que de crainte. Rebecca va devenir la confidente d'un triste secret de famille.

" Un jour, maman me dit que Mrs Jardine nous avait invitées, mes soeurs et moi, à aller cueillir des primevères sur sa colline, et après en avoir cueilli tant que nous en aurions envie, prendre le thé chez elle.
- Mrs Jardine? dîmes-nous. Est-ce la dame à qui appartient la maison qui est tout en haut du coteau?
- Oui, dit maman. Le Prieuré.
Elle tenait encore le billet dans sa main : papier mauve, couvert de grandes pattes d'araignée, anguleuses et nettes. "
Avec un début aussi enchanteur, une plume comme celle de Rosamond Lehmann (j'avais adoré L'invitation à la valse et Poussière), un titre si envoûtant, je ne pouvais qu'être séduite. Et bien, croyez -moi ou non, la magie n'a pas opéré. Cela fait trois fois de suite que les romans que je lis n'arrivent pas à me transporter. Et ça commence à me désoler. 
Je ne saurai dire exactement ce qui m'a déplu dans la lecture de La ballade et la source. L'ambiance est assez agréable, l'histoire non dénuée d'intérêt, ... mais ça n'a pas marché. Je trouve l'ensemble très brouillon. Je ne savais plus qui était qui, qui avait fait quoi ... L'histoire s'étale trop, elle est trop bavarde. Je me suis perdue. C'est dommage car l'histoire de Ianthé, la mère de Maisie, est touchante. Le fond est intéressant. Mais j'ai trouvé la forme trop lourde. Je suis passée à côté. Alors que je connaissais l'écriture si sensible et fine de Rosamond Lehmann, je ne l'ai pas retrouvé dans La ballade et la source. J'ai l'impression qu'elle aussi se perd dans son histoire et ses personnages. Je ne vous cache pas qu'étant beaucoup prise par le travail, mon esprit n'a pas du m'aider à me concentrer. Mais il n'en demeure pas moins que le roman est "trop". Trop long, trop pompeux, trop éclaté. Certaines scènes sont magnifiques et il m'a semblé retrouver la Rosamond Lehmann de Poussière et L'invitation à la valse. Mais elles n'étaient pas assez fréquentes pour me convaincre d'apprécier le roman dans son ensemble. 
Je ne suis pas pour autant fâchée avec cette belle plume anglaise. Intempéries et Le jour enseveli m'attendent patiemment et je serai ravie de les ouvrir. La ballade et la source ne m'a pas convaincu, mais Rosamond Lehmann reste une grande écrivain. 
En tout cas, vite, une lecture satisfaisante, je vous en prie. Trois lectures successives qui ne me transportent pas ... ça ne m'est jamais arrivé. Pas une 4ème .... s'il vous plaît!
Après ma difficile lecture du Rocher de Brighton, j'espérais tant de Rosamond Lehmann et sa douceur, que je suis totalement déçue et triste d'être passée à côté de ce texte. 

Se reporter vers son enfance, c’est comme regarder un de ces globes, ces globes à demi transparents, où gens et choses dorment enfermés. Une secousse, et ils remuent, s’agitent, tournent en s’entremêlant, puis s’immobilisent à nouveau. Les dates ne comptent plus. Le temps n’est pas un mouvement fait en avant ou en arrière, mais seulement ce globe incolore dans lequel ils sont contenus."
(La ballade et la source, Rosamond Lehmann, Livre de poche, 1955)

 (Source image : Renoir sur darnna.com)

dimanche 4 août 2013

Quand une lectrice devient auditrice ...

Livre audio
La dame aux camélias
Alexandre Dumas fils


Nouveauté dans ma vie de lectrice, j'ai écouté un livre audio.
Cette idée m'a toujours trotté dans la tête, mais je n'avais jamais réussi à la concrétiser. Lorsque j'ai du temps devant moi ,un instant, seule, sans rien à faire, je préfère m'installer et ouvrir mon roman plutôt qu'autre chose. Du coup, j'ai écouté de nombreux premiers chapitres de roman audio sans jamais continuer. Je ne prenais pas le temps. On ne prend jamais assez le temps de rien de toute façon. C'est bien connu!
Et puis, je réfléchissais à la place que j'accorderai aux livres audio dans ma petite vie. Allaient-ils me faire perdre mes précieuses heures de lecture ? Allaient-ils remplacer mes instants si essentiels où je me pose mon roman dans les mains ? Non. Hors de question.
Il y a des romans qu'on a lu il y a longtemps, que l'on aimerait bien redécouvrir, mais quand on est tout comme moi peu encline à la relecture (tant de nouveaux romans m'attendent), on finit par ne jamais les rouvrir. C'est cette place là que je vais donner dans ma vie aux livres audio. Me permettre de redécouvrir des œuvres aimées et lues jadis. De les redécouvrir différemment. Tout comme j'aimerai utiliser la lecture en VO (mais ça c'est une autre histoire …).
Autre souci. Les livres audio, c'est cher et il y en a peu. Heureusement internet existe et on tombe sur des perles telles que celle-là. C'est ce fantastique site de livres audio gratuits à télécharger qui m'a permise de découvrir le plaisir de l'écoute. Ils ont de nombreux titres et je ne peux que vous conseiller de jeter rapidement un coup d’œil. 
J'ai donc pris le temps chaque jour d'écouter un chapitre ou deux soit en me posant avec un café soit en préparant le repas, en faisant les poussières et j'ai même apprécié de faire le repassage (si si, tout est possible) grâce à Dumas fils. J'ai aimé cette expérience ... Elle ne m'a pas volé mes pauses lectures, mais a enrichi ma vie en littérature ... Tout ce que j'aime quoi!

J'ai lu La dame aux camélias il y a une bonne dizaine d'années. Je me souviens d'avoir ressenti un désespoir profond pour la pauvre Marguerite Gautier.  A la fin du roman, j'étais très triste. J'avais enchaîné avec un roman gai et léger tout de suite car je n'arrivais pas à tourner la page, à oublier mon chagrin et mon émotion. J'ai toujours gardé en souvenir la triste histoire de cette femme entretenue bien plus vertueuse que les grandes dames du monde. Replonger dans ce roman fut un régal. Surtout que l'enregistrement de ce roman est accompagné de belles musiques classiques telles que Gran Dio de La traviata. J'étais heureuse de revivre certaines scènes qui m'avaient tant émue : Marguerite prouvant à Armand qu'il ne doit pas être son amant, la réouverture de la tombe de Marguerite, la visite du père, l'envoi des 500 francs, ... J'ai été autant émue que lors de ma première découverte (même si lire un livre reste pour moi bien plus jouissif que de l'écouter ... c'est d'ailleurs pour cela que je ne veux pas entendre des livres audio jamais lus avant ... Le plaisir de lire reste irremplaçable). 
Je ne me souvenais pas à quel point le propos était parfois un peu osé. La modernité de la plume de Dumas fils ne m'avait pas frappé à ce point il y a 10 ans. Certains aspects de la vie de Marguerite sont crûment dits. Je ne me souvenais plus non plus à quel point Marguerite est frivole dans les premières pages. La fin m'avait tellement marqué que j'en avais oublié le début. 
C'est une histoire cruelle, touchante, désespérée. C'est romantique à l'extrême mais c'est beau et le destin de Marguerite ne cessera jamais de me toucher. Quelle femme! 
A lire, à écouter, à découvrir!
(Sources images : commons.wikimedia.org Toulmouche Le billet ; larousse.fr ; livres-anciens-rares.blogspot.com)

vendredi 2 août 2013

Emma ou la capacité de se remettre en question ...

Emma - BBC (1996)


La jeune et jolie Miss Woodhouse, de Hartfield, n'en a toujours fait qu'à sa tête et a décidé de ne jamais se marier. Elle vient de perdre sa gouvernante et amie, Miss Taylor, qui épouse un proche voisin, veuf depuis longtemps, le colonel Weston. Persuadée qu'elle a été l'instigatrice de cette union, Emma décide de tromper son ennui et sa solitude en continuant à organiser le mariage de ses connaissances, au grand effroi de son vieux père qui ne supporte aucun changement dans ses habitudes, et malgré les remontrances amicales de Mr Knightley, qui est à la fois un vieil ami (il la connait depuis 16 ans), le riche propriétaire de Donwell Abbey et son beau-frère. Elle se met donc en tête de marier la nouvelle amie dont elle s'est entichée, la jolie orpheline Harriet Smith, avec le jeune curé de la paroisse, Mr Elton, mais ses tentatives tournent court, car c'est elle, à sa grande horreur, que Mr Elton veut épouser (wikipedia.org).

Allez savoir pourquoi mais jusqu'à hier, cette version d'Emma ne me tentait pas du tout ... Je n'ai pas d'explications particulières. 
Je me suis tout de même laissée convaincre de m'installer confortablement hier soir devant cette version du magnifique roman de dame Austen (en mettant de côté qu'il était en français ... J'aime regarder les adaptations de la BBC en Vost). Et j'ai totalement embarqué à ma grande surprise. Alors oui, les acteurs sont bien moins séduisants que dans la version cinématographique avec Gwyneth Paltrow et le tout a un peu vieilli, mais je l'ai trouvé magnifique. Je n'ai pas encore vu la dernière version avec Romola Garai, mais si je devais comparer les deux versions d'Emma sorties la même année (1996), celle-ci et celle avec Gwyneth Paltrow, je trouve la première bien plus fidèle au roman que la seconde. Oui, Mark Strong n'a pas la prestance de Jeremy Northam, mais j'ai trouvé son jeu très sensible, son interprétation identique au personnage du roman. C'est un acteur que j’aime beaucoup dans ses rôles de méchants et je suis contente de voir qu'il a également su me convaincre dans un rôle de héros austenien. Kate Beckinsale est, quant à elle, une Emma parfaite (même si dans ma tête je la vois blonde et non brune). Un sourire malicieux, un air de peste mais un coeur énorme. J'aime décidément beaucoup ce personnage! Tous les autres acteurs sont excellents. Les âges ont été respectés, ce qui n'est pas toujours le cas. Miss Fairfax montre bien ce mélange de timidité et cette force de caractère, Miss Smith est bien mieux interprétée et moins caricaturale que dans la version ciné, j'ai eu envie d'arracher les cheveux de ce bellâtre de Mr Churchill et Mrs Elton .... quelle horreur cette femme!
 ... Bref, des choix qui sont pour moi parfaits. 



Quant à l'histoire, j'étais, au bout de deux secondes, complètement happée. J'attendais totalement frémissante les scènes clés comme celle du pique-nique, du bal à la Couronne, de la déclaration, .... J'étais plongée dans l'histoire comme lors de ma lecture du roman. 
Ce que j'adore dans cette histoire, c'est la relation entre Emma et Mr Knightley. Cette confiance, cette complicité, .... Un délice! Et je trouve que cette adaptation a parfaitement rendu ce qui a de magique dans leur histoire. Les jeux de regard, le rôle de grand frère de Mr Knightley, l'admiration et la confiance d'Emma, ... Vraiment très réussi. 



Bref, je pense que je vais m'offrir d'ici peu cette belle et touchante adaptation. Elle rejoindra ma collection qui peu à peu s'étoffe. Elle compte déjà : Raison et sentiments d'Ang Lee et celle de la BBC réalisée en 2008, Orgueil et préjugés 1995, Northanger abbey 2007, Persuasion 2007. Tiens, mais c'est bientôt mon anniversaire !!??
J'essaierai de venir commenter la version avec Gwyneth Paltrow qui, elle aussi, est réussie bien que moins fidèle au roman. Et je vais tenter de me procurer et de voir la dernière adaptation avec Romola Garai, le format est plus long et le choix de l'actrice est je trouve très bon. On verra!

(Sources images : costumedramas.wordpress.com ; janeitesonthejames.blogspot.com ; myemmaproject.wordpress.com ; old-fashionedcharm.blogspot.com ; photos.lucywho.com)