Un thé au Sahara
Paul Bowles
Petit bac 2015
L'imaginaire Gallimard, 1952.
Un couple d'Américains, Port et Kit Moresly, en compagnie de leur ami Tunner, parcourent l'Afrique du nord, de la côte au Sahara. Les Moresly, bien que mariés depuis onze ans, est loin de s'entendre. Au cours du voyage, Kit a une brève aventure avec Tuner ; mais cette femme tourmentée n'en retire qu'un complexe de culpabilité supplémentaire.
(J'ai coupé la quatrième de couverture. Bien que j'aime beaucoup L'imaginaire Gallimard, cette collection a une fâcheuse tendance à en dire trop et à dévoiler toute l'histoire des romans)
Au diable la saison d'été qui ne me laisse que peu de temps pour lire! J'ai lu 10 pages par jour d'Un thé au Sahara pendant 3 semaines. J'avais choisi ce titre me disant que la chaleur estivale collait bien à l'ambiance saharienne. Malheureusement, c'était sans compter la complexité du roman. J'ai réussi à me plonger dedans qu'aux 100 dernières pages ... quand enfin j'ai eu le temps de lire davantage. J'ai mis beaucoup de temps à prendre plaisir à le lire, mais je pense vraiment que c'est de ma faute. Je n'aurai pas du le choisir durant cette période de travail intense.
Kit et Port, ainsi que tous les autres personnages de ce roman, ne sont pas attachants. On ne les comprend pas. Je n'ai pas compris leurs choix, leurs pensées, leurs désirs. Le monde de Paul Bowles est très pessimiste. Je serai incapable de décrire la relation de Kit et Port. Est-ce de l'amour, de la haine, de la tendresse, de la routine?? Ils ne se parlent pas et Bowles n'explique pas tout. Le roman est parfois aussi flou que l'esprit des personnages. Quant à sa vision du désert, elle n'a rien d'un orientaliste romantique et Bowles montre une terre dure, sèche et sans pitié. Les 200 premières pages d'Un thé au Sahara m'ont complètement déstabilisée. Les errances de Port, les réactions de Kit, l'attitude de Tunner et ce couple étrange des Lyle, ... je ne comprenais pas où me menait Bowles. Puis, mon attention est revenue. A partir de la maladie de Port, j'ai eu du mal à lâcher le roman. Bowles a une écriture très puissante. Il crée une ambiance étouffante et malsaine en quelques mots. Même si Kit m'était toujours aussi mystérieuse et incompréhensive, j'ai été touchée par cette femme perdue, cherchant à tout prix à échapper à la peine et à la douleur. Après avoir souffert pendant plusieurs pages d'incompréhension et parfois d'ennui, je me suis retrouvée passionnée et haletante. Au début du roman, j'étais persuadée que je finirai ce texte avec soulagement et rédigerai un avis entièrement négatif. Mais au final, j'ai conscience d'avoir lu un roman profond, complexe et malgré tout, prenant.
Je suis vraiment déçue de ne pas avoir eu plus de temps libre pour rentrer dès le début dans ce roman. Il mérite qu'on s'y arrête. Un thé au Sahara n'est pas un roman de plage, il demande de la réflexion et de la patience.
Un roman assez perturbant à découvrir.
Cette édition est accompagnée de l'adaptation de Bertolucci de 1990 que je visionnerai dans quelques jours.
"Kit tira sur sa robe et dit : "Quand j'étais jeune..."
- Jeune?
- Avant d'avoir vingt ans, je veux dire, je croyais que le mouvement de l'existence ne cessait de s'accélérer, qu'elle devenait chaque année plus riche et plus profonde, qu'on apprenait davantage, qu'on gagnait en sagesse, en compréhension, qu'on allait plus loin dans la vérité...
Elle hésita. Port eut un rire brusque.
- Et maintenant tu sais que ce n'est pas comme ça? Oui? Ça ressemble plutôt à une cigarette, Les premières bouffées sont merveilleuses, et on imagine pas qu'on en verra le bout. Puis ça devient naturel. Et tout à coup on s’aperçoit qu'on la presque finie. Et c'est alors qu'on sent le gout amer.
- Mais je suis toujours consciente de son amertume et je sais toujours qu'il n'y en a pas pour longtemps, dit-elle.
- Alors tu devrais cesser de fumer.
- Que tu es mesquin! s'écria-t-elle."
(Un thé au Sahara, Paul Bowles, 1952, Imaginaire Gallimard)