mercredi 30 décembre 2015

Mes coups de coeur 2015

Petit bilan de mes coups de cœur 2015


Voilà l'année 2015 se termine ... et un bilan littéraire s'impose. 
Je n'ai pas lu beaucoup cette année (34 romans ... contre une 50aine les années précédentes), mais j'ai lu tous les jours et toujours avec autant de plaisir malgré mes deux loulous, mon travail, mon Romanzo et une vie pleine d'activités.

J'ai participé à deux challenges. Le Petit bac d'Enna et j'ai réussi à lire un roman pour chaque catégorie (mon billet récap'). Quant au challenge Myself que j'organise, j'ai lu comme prévu mes 4 romans de saison (un bilan global arrivera dans quelques jours).


Et voici mes coups de cœur de l'année :


- La petite princesse de Burnett : Mon âme d'enfant retrouvée.
- Crime et châtiment de Dostoïevski : Un grand roman, bien plus grand que moi, presque intimidant, mais envoûtant et inoubliable.
- Katrina de Salminen : Simple mais sublime
- Louis et la jeune fille de Ladjali : Un court roman qui m'a profondément émue
- La couleur des sentiments de Stockett : De l'humour, de la tendresse, ... L'émotion à chaque page
- Les filles de Hallows farm de Huth : Lecture immersion. J'étais à Hallows farm durant toute ma lecture.
- Les vagues de Woolf : La maîtrise et l'émotion, le génie et l'humanité, la prouesse et la sensibilité
- Toute passion abolie de Sackville-West : Une écriture délicate et pure, une héroïne attachante, comme une amie, une sœur que l'on ne veut plus quitter. Un roman que je relirai
- Du fond de mon cœur de Austen : Le plaisir inconditionnel de retrouver la plume vive de Jane Austen et de connaître davantage la femme derrière l'écrivain

J'ai retrouvé aussi, avec autant de plaisir, cette année Barbara Pym avec son Quatuor d'automne, ma chère Agatha Christie avec L'heure zéro et Edith Wharton et Les New-Yorkaises

Une année de belles lectures malgré quelques déceptions (peu nombreuses). J'espère réussir à lire davantage en 2016. J'espère aussi poursuivre mes rituels "réveil-lecture" (chaque matin depuis plusieurs semaines, je mets mon réveil 30 mn plus tôt pour commencer ma journée par quelques pages de lecture au lit avec mon thé. Parfois ce n'est pas simple de résister à la tentation de dormir une demi-heure de plus, mais l'effort est vite récompensé). 


Je vous souhaite de tout mon cœur une belle année 2016! 

Jeux d'enfant

 Le pays où l'on arrive jamais
André Dhôtel

Petit bac 2015

J'ai lu, 1959.

"Il y a dans le même pays plusieurs mondes véritablement. Dans les contrées situées au nord, jusqu'au Rhin ou jusqu'au port d'Anvers, ce sont des centaines de collines et de plaines chargées de richesses, et l'on peut voir aussi les eaux immenses des canaux, des fleuves, des bras de mer, tandis qu'au cœur des villes, sur des places, souvent désertes, s'élèvent les beffrois qui inspirent autant de terreur que d'admiration.
La vie routinière et sage de Lominval, petit village des Ardennes, aurait dû mettre Gaspard, fils de forain, à l'écart de toute vie aventureuse. Mais un regard échangé avec un enfant fugitif qui a décidé de retrouver "Maman Jenny" et le pays de son enfance va l'entraîner, malgré lui, dans une cascade d'aventures surprenantes et merveilleuses.

Le pays où l'on arrive jamais est un roman qui traînait depuis des temps immémoriaux dans ma bibliothèque. Il s'agit d'un des souvenirs de lecture de mon frère aîné. Il m'en a souvent parlé et j'avais gardé dans le coin de ma tête l'idée de le découvrir un jour. Certes j'ai attendu mes 30 ans pour le lire, mais je l'ai lu.
Même si Le pays où l'on arrive jamais est une jolie histoire, je dois avouer m'être vite lassée des aventures de Gaspard. J'ai beaucoup aimé les premiers chapitres sur la vie à Lominval, les malchances de Gaspard et l'apparition de l'enfant fugitif. La rencontre entre les deux jeunes gens est touchante et j'ai suivi avec intérêt la fuite de Gaspard pour retrouver son ami. Malheureusement, j'ai vite trouvé ses aventures très répétitives. J'ai fatigué rapidement de le voir chercher sans jamais trouver, aller et venir entre les mêmes endroits. Mais là où j'ai été le plus déçue c'est lorsque Gaspard trouve enfin le pays tant recherché. J'ai trouvé les dernières pages vraiment alambiquées et presque lourdes. Je m'attendais à plus de magie et une jolie morale sur le pouvoir de l'imagination et la force de l'enfance
Une expérience en demi-teinte. Je suis heureuse d'avoir découvert ce roman (ancien coup de cœur de mon frère) et je le conseillerai peut-être à mes enfants plus tard, mais mon intérêt s'est vite essoufflé et je n'ai pas réussi à embarqué dans ce "pays" merveilleux. 
" Il y a dans le même pays, plusieurs mondes véritablement. Si l'on explore les Ardennes, ce n'est pas une forêt que l'on découvre, mais mille forêts. Dans les contrées situées au nord, jusqu'au Rhin ou jusqu'au port d'Anvers, ce sont des centaines de collines et de plaines chargées de richesses, et l'on peut voir aussi les eaux immenses des canaux, des fleuves, des bras de mer, tandis qu'au coeur des villes, sur des places souvent désertes, s'élèvent les beffrois qui inspirent autant de terreur que d'admiration. "(Le pays où l'on arrive jamais, André Dhôtel, J'ai lu, 1959, p5)

dimanche 27 décembre 2015

" J'ai perdu un trésor, une sœur et une telle amie que jamais rien ne pourra la surpasser. "

Du fond de mon cœur
Jane Austen

Lettres à ses nièces 


Finitude, 2015.

Inédites et passionnantes, les lettres de Jane Austen à ses trois nièces préférées dressent un portrait émouvant de l’auteur d’Orgueil et Préjugés.
En tante attentionnée, elle se montre toujours prête à guider ses jeunes nièces, à les conseiller. Elle leur parle d’écriture, de stratégie amoureuse, de sa vie à la campagne, avec l’humour et l’élégance qui font le sel de ses romans. Ces lettres révèlent une touchante intimité et on acquiert bien vite la conviction que Jane Austen n’avait rien à envier à ses attachantes héroïnes.


Dieu que c'est bon! Je n'avais pas ouvert de textes de Jane Austen depuis plusieurs années (il s'agissait d'Emma) et ça fait un bien fou de la retrouver. Elle me manquait. 
Du fond de mon cœur réunit quelques unes des lettres de l'écrivain anglaise et c'est un régal. Le seul défaut de ce recueil est son nombre réduit de pages.  La sœur de Jane Austen, Cassandra, ayant détruit plusieurs de ses lettres à sa mort, il ne nous reste malheureusement que très peu de ses missives. J'aurai aimé en lire plus. Mais j'ai tout de même apprécié de découvrir Jane Austen. Non l'écrivain, mais la femme. J'ai retrouvé son humour, son ironie, sa finesse. Non, Jane Austen n'a rien à envier à ses héroïnes. J'ai lu ses lettres comme si elles m'étaient adressées. Jane Austen est devenue une amie. Quand Cassandra prend la plume pour parler du décès de sa sœur, mon cœur s'est serré. 
Dans ces lettres, Jane Austen apparaît comme une femme pleine de gaieté et de joie. Elle est attentive aux autres et donne des conseils à ses nièces sur l'amour et l'écriture. 
" Ta tentative d'attiser tes sentiments en visitant sa chambre m'a extrêmement divertie. La serviette à barbe sale, c'est exquis! Un tel détail se doit d'être publié. Bien trop savoureux pour être perdu. " (p43)
Elle est aussi capable de franchise et de beaucoup de culot. C'est une femme intelligente, cultivée, qui sait penser par elle-même et le revendique. Elle n'hésite pas à critiquer ...
" Demain, ta Grand-Maman souhaite se rendre à Spleen Hill à dos d'âne pour rendre visite aux Mrs Hulberts ; elles n'ont pourtant pas grand intérêt, ni l'une ni l'autre. Selon les nouvelles, leur état se détériore gravement. Loin d'être aussi résistantes que notre vieux baudet. " (p75) 
Ou encore, lorsqu'elle parle d'une amie ayant mis au monde son 18ème enfant : 
" Cette bonne Mrs Deedes! J'espère que tout se passera bien pour sa petite Marianne, et ensuite, je leur recommanderai, à elle et Mr D, de pratiquer ce régime assez simple que nous appelons faire chambre à part. " (p88)
Jane Austen a un discours résolument moderne. Pour elle, se marier et être mère de 20 enfants n'est pas une fatalité. Elle a un regard assez franc et direct sur le mariage. 
J'ai aimé les pages où elle parle de ses romans. Ce sont ses enfants. On sent dans ses mots qu'elle est heureuse et que l'écriture la comble profondément. A la naissance de sa petite nièce, elle écrit à la nouvelle mère :
" Ma chère Anna, De la même façon que je désire faire la connaissance de ta Jemina, je suis certaine que tu apprécieras de faire celle de mon Emma, et j'ai donc grand plaisir à te l'envoyer pour lecture. " (p69) 
Chaque lettre est un petit bonbon délicieux. J'ai dégusté chaque mot. Le beau langage, la bienséance, l'humour, le mordant, on retrouve tout ce qui fait la grandeur des romans de dame Austen. Je n'ai pas eu envie de la quitter. Je n'ai qu'une hâte, celle de découvrir les derniers textes de Jane que je n'ai pas encore lus : Mansfield park, les Juvelinia et ses textes inachevés. 
Ce livre est fait avec amour. Tout se déguste, de la préface aux lettres finales en passant par les annotations, ... Un petit bijou. Un coup de cœur.

Merci à Lou à qui je dois cette découverte. 
" Ma chère Anna, Nous avons été fort diverties par tes trois cahiers, cependant, j'ai un bon nombre de remarques à faire - plus qu'il ne te plaira. Nous ne sommes pas convaincues par la manière dont tu installes, sans aucune motivation particulière, Mrs Fisher comme loctaire et proche voisine d'un homme tel que Sir T. H ; il faudrait qu'elle ait quelque amie vivant dans les alentours qui soit à l'origine de cette décision. Une femme aussi prudente que Mrs Fisher, ayant deux toutes jeunes filles, ne s'aventurerait pas à commettre la maladresse d'emménager dans un quartier où elle ne connaît personne excepté un seul homme, au caractère fort peu respectable qui plus est. Souviens-toi, elle est très prudente ; tu ne peux la laisser agir de façon inconséquente. Invente-lui une amie et laisse celle-ci la faire inviter au Prieuré, ainsi nous n'aurons aucune objection à ce qu'elle dîne là-bas comme elle le fait ; sinon, une femme dans la situation de Mrs Fisher ne s'y rendrait certainement pas avant que d'autres familles lui aient fait auparavant une visite de courtoisie. "(Du fond de mon cœur, Lettre à Anna du 9 septembre 1814, Finitude, p 25)

samedi 26 décembre 2015

Pourquoi tant de haine?

Moby Dick
Herman Melville

Lecture commune avec Unlivre Unthé

Folio, 2014.

Considérez le cannibalisme universel de la mer, dont toutes les créatures s'entre-dévorent, se faisant une guerre éternelle depuis que le monde a commencé.

Considérez tout ceci, puis tournez vos regards vers cette verte, douce et très solide terre ; ne trouvez-vous pas une étrange analogie avec quelque chose de vous-même ? Car, de même que cet océan effrayant entoure la terre verdoyante, ainsi dans l'âme de l'homme se trouve une Tahiti pleine de paix et de joie, mais cernée de toutes parts par toutes les horreurs à demi connues de la vie. Ne poussez pas au large de cette île, vous n'y pourriez jamais retourner.


Je l'ai fait! J'ai lu Moby Dick, LE monstre de la littérature. Je dois confesser que ce fut rude.
Les 100 premières pages de ce roman sont excellentes. J'ai aimé l'ambiance lourde et sombre des bars de marins et cet appel du large qui prend aux tripes. L'écriture de Melville n'étant pas dénuée d'humour, j'ai souvent souri durant les premiers chapitres. La rencontre entre Ishmaël et Queequeg est quant à elle très émouvante. J'ai attendu avec impatience le moment du départ et finalement c'est une fois que le navire prend la mer que le rythme s’essouffle considérablement. A partir de ce moment, ce n'est plus un roman que l'on lit mais un ouvrage de sciences naturelles ou une thèse sur l'histoire des baleiniers. Je reconnais l'écriture rigoureuse et travaillée de Melville, son ton léger et sa minutie, mais ces 400 pages sur l'histoire de la baleine ont été trop difficiles pour moi (surtout en cette période de fêtes et de cadeaux). J'ai tellement regretté de ne pas suivre les aventures des marins du Péquod, de retrouver le lien d'amitié entre Queequeg et le narrateur, de connaître la vie, les émotions des personnages, ... On ne sait rien sur Ishmaël qui ne se livre jamais, ne se confesse pas. Durant toute ma lecture, il m'a été impossible de m'attacher à un personnage car ils ne sont jamais mis en avant, voire presque inexistants. Le fameux capitaine Achab ressemble presque à un fantôme tant sa présence, ses paroles, son aspect restent énigmatiques. L'image de la baleine blanche Moby Dick plane sur tout le roman pour la voir apparaître finalement très brièvement 50 pages à peine avant la fin. Le roman reprend un peu de rythme à l'apparition du cachalot, mais tellement épuisée par les centaines de pages précédentes, je n'ai pas réussi à m'y plonger. 
L'intrigue de Moby Dick fait à peine 150 pages. Je le savais mais je m'attendais à de grandes envolées lyriques et à beaucoup de poésie. Je m'étais préparée à un long poème métaphorique comme Le vieil homme et la mer. Je ne m'attendais pas du tout à un texte si concret, scientifique et pratique. 
Je ne peux véritablement critiquer un texte de cette ampleur car je n'ai sûrement pas saisi toutes les références, les paraboles, les métaphores. L'écriture mérite qu'on s'y attarde et les premiers chapitres sont passionnants. Je reconnais aussi avoir beaucoup appris et je n'ai pu m'empêcher de rechercher sur internet d'autres informations sur les cachalots et les baleiniers. Mais il faut se préparer à une lecture comme celle-ci. Il faut avoir du temps devant soi et l'esprit disponible. 
Bref ... J'ai lu Moby Dick.  

" Le vent commençait à hurler, les vagues entrechoquaient leurs boucliers ; le grain rugissait, sautait, craquait autour de nous comme un feu blanc sur la prairie, un feu dans lequel nous brûlions sans être consumés, immortels dans la gueule même de la mort ! Nous appelions en vain les autres canots. Autant valait hurler dans la cheminée d’une fournaise que de héler les bateaux dans un tel orage. Cependant les nuages volants, l’écume et le brouillard devenaient encore plus noirs avec la nuit qui tombait ; il n’y avait aucun indice du vaisseau. La mer rageuse empêchait tous les essais que nous faisions pour écoper. "
(Moby Dick, H. Melville, Folio, 2014)


(Source image : avidly.lareviewofbooks.org)