dimanche 20 septembre 2009

"Ces millions de trajectoires solitaires"

Les heures souterraines
Delphine de Vigan
JC Lattès, 2009.

Mathilde et Thibault ne se connaissent pas. Au cœur d'une ville sans cesse en mouvement, ils ne sont que deux silhouettes parmi des millions. Deux silhouettes qui pourraient se rencontrer, se percuter, ou seulement se croiser. Un jour de mai.
Les heures souterraines est un roman vibrant et magnifique sur les violences invisibles d'un monde privé de douceur, où l'on risque de se perdre, sans aucun bruit.

J'ai ouvert ce roman un peu sur la défensive. Le thème, le titre, l'auteur, je ne partais pas totalement convaincue. J'aime les lectures qui me font m'évader loin de mon quotidien, qui me détendent, m'apaisent. Un roman parlant des violences silencieuses du monde du travail, de l'atmosphère pesante de la ville, de la solitude dans la foule et de l'angoisse qui empêche de vivre n'est pas vraiment un roman qui détend. Les thèmes durs sont nécessaires, vitaux. Mais je dois avouer que d'habitude, mes envies vont vers des styles moins contemporains, moins proches, moins accessibles, touchant moins à notre vie actuelle. Mais cela étant dit, j'ai aimé ma lecture. J'ai été touchée par l'histoire de Mathilde et par celle de Thibault. Mathilde vit un véritable calvaire, une tragédie silencieuse. Ce roman montre bien que l'horreur n'est pas forcément crue, brutale, sanglante. Elle peut se manifester n'importe quand, à n'importe quel moment. Elle apparaît silencieusement, à l'abri des regards et détruit petit à petit, sans faire de miettes, sans hurlements. "A trente ans, elle a survécu à la mort de son mari. Aujourd'hui, elle en a quarante et un connard en costume trois pièces est en train de la détruire à petit feu. " (p174).
Un roman a ne pas lire dans un moment de déprime. Un roman qui nous montre les gens que l'on croise dans la rue, dans les transports, différemment. On possède tous notre part de drames et de souffrances silencieuses.

" Ou bien elle rencontrerait un homme, dans le wagon ou au café de la gare, un homme qui lui dirait madame vous ne pouvez pas continuer comme ça, donnez-moi la main, prenez mon bras, posez votre sac, ne restez pas debout, c'est fini, vous n'irez plus, ce n'est plus possible, vous allez vous battre, je serai à vos côtés. Un homme ou une femme, après tout, peu importe. Quelqu'un qui comprendrait qu'elle ne peut plus y aller, que chaque jour qui passe elle entame sa substance, elle entame l'essentiel."
(Les heures souterraines, Delphine de Vigan, 2009)



(Source image : slauro.blog.pacajob.com)

3 commentaires:

Fleur a dit…

J'ai lu récemment de cet auteur No et Moi qui a été un vrai coup de coeur, je poursuivrai bien la découverte avec celui-ci...

Comte Todd a dit…

Eh bien ton avis me donne envie de découvrir ce livre, ça n'a pas l'air bien joyeux effectivement... mais ça parait très troublant et ça me fera du bien :) je le note, merci Romanza :)

Titou a dit…

une auteur que j'adore... je vous conseille tous ces livres !