vendredi 15 mars 2013

" Dans l'âme des gens, les raisins de la colère se gonflent et mûrissent ... "

Les raisins de la colère
John Steinbeck
Matilda's contest 

Folio, 2009. 

Dans les années 30, le Middle West américain est frappé de plein fouet par la Grande Dépression, la sécheresse et le Dust Bowl. Endettés, dépassés par les nouvelles méthodes agraires, des milliers de famille partent pour l'eldorado, la Californie. Les vallées vertes et productives de cet état font rêver les grandes familles de l'Oklahoma comme les Joad, qui un jour font leurs valises et partent tous ensemble vers la Californie, sur la célèbre nationale 66, à 12 personnes dans un camion (suite101.fr)

Je viens de tourner la dernière page des Raisins de la colère et le dernier chapitre est tellement chargé d'émotions que j'ai une grosse boule dans la gorge prête à éclater
Oui, ce roman est assez lent et je peux comprendre les lecteurs qui se sont un peu ennuyés à des moments. Mais moi, j'ai aimé cette langueur. Ce récit de Steinbeck m'a totalement enveloppée, emportée. J'étais assise dans le camion avec la famille Joad, j'avais froid et faim. J'ai espéré et j'ai pleuré aussi. Je me suis pliée dans les champs de coton et j'ai ramassé des kilos de pêches pour quelques cents. C'est humain, ça sonne juste, ça parle vrai, c'est à la fois très simple et profondément complexe. L'écriture de Steinbeck m'a régulièrement mise à genou. Dans un regard, dans un geste, dans un mot, il nous montre l'Homme dans son intégralité, avec ses failles, ses forces, ses peurs. C'est un roman extrêmement travaillé. La structure même du récit est exceptionnelle avec ce changement permanent de ton. Les chapitres longs parlant de la vie quotidienne de la famille Joad alternent avec les chapitres courts qui eux traitent de façon plus générale de la vie des  migrants, mais également de l'humanité toute entière. 
J'aurai aimé étudier ce roman, le fouiller, le comprendre, le disséquer. Malgré une écriture, un style et une histoire très simple et ne possédant pas une intrigue très palpitante, ce roman est, pour moi, très complexe, plein de symboles et d'images. A travers la famille Joad, Steinbeck condamne, dénonce, prend parti. Ce roman fait mal, chamboule et torture. Les raisins de la colère est plein de poussière, d'humidité, de puanteur, mais nous fait comprendre que c'est dans ces choses désagréables que l'on trouve l'entraide, la solidarité, l'humanité. 
Un roman dont il est difficile de parler ... 
Une chose est sûre, j'aime la littérature classique américaine. 

" Le soleil s’étendait sur l’herbe et la réchauffait, et dans l’ombre protectrice, les insectes s’agitaient, fourmis, fourmis-lions, sauterelles, cloportes, sans cesse en mouvement sur leurs pattes nombreuses et fragiles.
Au bord de la route, une tortue rampait, traînant sur l’herbe le dôme de sa carapace. Ses pattes dures, ses pieds armés d’ongles jaunes peinaient à traverser les herbes. Elle ne marchait pas vraiment, elle hâlait, hissait sa carapace. Les barbes d’orge glissaient sur son écaille. Son bec corné était entrouvert et ses yeux cruels et ironiques sous leurs sourcils en forme d’ongles regardaient droit devant eux."
(Les raisins de la colère, J. Steinbeck, Folio, 2009, p 25)

(Source image : toutlecine.com)

8 commentaires:

bizak a dit…

De tous les romans de Steinbeck, "les raisins de la colère" est celui qui m'a arraché mes tripes! On ne sort presque pas indemne en lisant un roman d'une telle intensité. Je l'ai lu, voilà deux années, deux années qu'il mijote encore dans ma tête.
La fin du roman m'a bouleversé par ce passage particulier(quand la fille de Man,Rose de Saron déjà elle même affamée donna son sein pour nourrir le vieillard au seuil de la mort :"Et lentement elle s'étendit près de lui. Il secoua faiblement la tête. Rose de Saron écarta un coin du châle, découvrant un sein.
- Si, il le faut, dit-elle,
Elle se pressa contre lui et attira sa tête vers elle,
- là! là.

Shelbylee a dit…

Je discutais justement il y a peu avec une de mes amies en disant que je connaissais mal la littérature classique américaine et je n'ai jamais lu Steinbeck. Cela fera peut être l'objet de mon Challenge Myself l'an prochain ;-)

Romanza a dit…

Bizak : Je pense qu'il fait effectivement parti des romans qui ne nous quittent pas!

Shelbylee : Oh oui! On remet ça l'an prochain

La Lyre a dit…

C'est un roman que je n'ai pas réussi à finir, mais visiblement c'est une grosse erreur de ma part! Il faut que je m'y rejette!

Fleur a dit…

C'est un classique que je voudrais lire depuis quelques années, mais je ne m'y suis pas encore attelée. Il m'attire à la fois pour cette histoire familiale mais également pour son côté historique.

Lilly a dit…

C'est un beau billet que tu nous offres, mais un peu effrayant. J'ai lu et aimé "Des souris et des hommes" (un peu moins que je l'aurais voulu malgré tout), et ce livre semble être le grand chef d’œuvre de Steinbeck. J'imagine qu'il va me falloir du courage pour m'y mettre.

maggie a dit…

IL FAUT que je le lise ! Une oeuvre qui me fait rêver depuis toujours, comme Shelbylee, ça fait partie de mes défis personnels !

Anonyme a dit…

Je l'ai lu dans mon adolescence, il ne m'en reste pas grand chose, il y a comme cela des livres qu'il faudrait relire.