samedi 23 novembre 2013

" Et maintenant, ..., adieu bonté, humanité, reconnaissance ... Adieu à tous les sentiments qui épanouissent le coeur! "

Le comte de Monte Cristo
Alexandre Dumas

Folio, 2012.

Edmond Dantès, jeune officier, revient d'un voyage à bord du Pharaon, navire appartenant à l'armateur Morrel. Il a dû remplacer le capitaine Leclère, décédé durant le voyage, des suites d'une fièvre cérébrale. Le 24 février 1815, c'est donc lui qui ramène le Pharaon dans le port de Marseille. Dès son arrivée, il est accueilli par Morrel qui lui promet de le nommer capitaine. Dantès est au comble du bonheur : il va ainsi pouvoir aider financièrement son vieux père et épouser sa belle fiancée, la Catalane Mercédès. Mais ce bonheur suscite la jalousie. Il y a tout d'abord Danglars, le comptable du bateau qui brigue le poste de capitaine du Pharaon, et aussi Fernand Mondego, un pêcheur amoureux de Mercédès et repoussé par elle.
Aidés de Caderousse, voisin et ami de Dantès, Danglars et Fernand vont comploter pour se débarrasser d'Edmond.
(Wikipedia.org)
Bon, il faut que j'arrête de reculer, de repousser et de trouver toujours des excuses. Je tourne autour du pot depuis plusieurs jours. J'essaie en vain de me lancer dans l'écriture de cet avis. Je sais avant même de rédiger ce billet que je n'en serai pas satisfaite. J'ai trop de choses dans le coeur, trop de choses à dire et d'autres à taire. La lecture du Comte de Monte Cristo est comparable à nulle autre. On plonge dans un monde plein de violences, de haines, de complots, un univers si addictif que l'on n'en ressort plus. 1400 pages qui se lisent d'une traite, le souffle coupé, sans aucun moment long ou inutile, la main tremblante, le coeur serré
Je connais le génie de Dumas depuis presque 15 ans. La reine Margot fut ma première lecture de ce grand homme et un de mes plus forts souvenirs littéraires. Je ne peux y repenser sans émotion. Puis il y a eu l'inoubliable Les trois mousquetaires, le touchant La tulipe noire, le passionnant La guerre des femmes et l'agréable Pauline. Je pensais que Dumas n'avait plus rien à me prouver, je connaissais sa plume si vive, drôle, dynamique, je connaissais son talent pour écrire des intrigues palpitantes et menées à la perfection, ainsi que sa poésie et sa délicatesse. En ouvrant, Le comte de Monte Cristo, je m'attendais vraiment à trouver un joyau ... Malgré ça, bien que je m'y sois préparée, je suis à genoux, éblouie. 4 jours après ma lecture, je suis toujours à côté d'Edmond Dantés, cet homme grave, sévère, intimidant ... mais si parfait. 
Je n'ai pas retrouvé dans ce roman l'humour si piquant de Dumas. Mais ce livre est si sombre, si dramatique (presque tragique) que l'humour n'a pas sa place ici. Ce manque de légèreté ne m'a pas manqué car il n'aurait pas collé à cette histoire si sombre. Par contre, j'ai retrouvé sa sensibilité, sa délicatesse, sa passion, son art de tenir en haleine son lecteur qui devient tout bonnement incapable de lâcher le roman. J'ai rarement lu un texte si bien ficelé, une intrigue parfaite en tout point. Aucune faiblesse, aucune facilité. De l'excellence du début à la fin. Je me demande même où Dumas (et Auguste Maquet, son collaborateur ... rendons à César ce qui est à César) a trouvé toutes ses idées. La construction de la vengeance de Dantés est scotchante. Cette idée de ne jamais dire avant la fin que le comte de Monte Cristo est Edmond Dantés (alors que le lecteur le sait très bien) est géniale. Lorsque tombe cette phrase : "Je suis Edmond Dantés" ... Notre coeur s'arrête ... Et pourtant, on savait! La différence entre ses deux personnalités Dantés/le comte, qui sont pourtant la même personne, est saisissante. Edmond Dantés est la part humaine de notre héros. Le naïf capitaine du Pharaon captif malgré lui et, dans les dernières pages, l'homme mûr qui se demande si sa vengeance n'a pas dépassé les limites. Le comte de Monte Cristo lui ne fléchit pas, ne doute pas, il est sans pitié et déterminé à faire tomber les coupables. 
Le comte de Monte Cristo nous offre des personnages tous plus inoubliables les uns que les autres. Bien sûr, il y a notre héros qui surpasse tous les autres en intelligence, en charisme, en stratégie, en émotion. Mais on croise aussi le terrible Villefort, la triste Mercédés, le touchant Maximilien, le séduisant Luigi Vampa, ... Chaque personnage a sa propre histoire, son moment de gloire (ou de défaite), devient le héros durant quelques pages. Et toujours, telle une ombre survolant la terre, le comte de Monte Cristo veille, attend le moment où sa toile d'araignée sera achevée et où il pourra enfin frapper le dernier coup. Il est partout, contrôle tout. 
Dumas reste Dumas ... et dans chacun de ses romans, le fond historique a son importance. C'est à Dumas que je dois tout ce que je sais sur la Saint Barthélémy, la fin des Valois, les guerres de religion. C'est lui qui m'a fait comprendre qu'un roman historique fallait 100 cours d'Histoire. Certes, Le comte de Monte Cristo n'est pas un roman historique et le contexte est moins présent, moins important que dans d'autres de ses romans. Mais j'ai tout de même apprécié de revoir l'histoire de la chute de Napoléon, les 100 jours, la Restauration, ... Parce qu'en plus d'en prendre plein les yeux et plein le coeur, avec Dumas, notre petit cerveau apprend plein de choses. 

C'était inutile d'essayer de faire un avis ... Je crois que j'aurai mieux fait de me taire. Après une telle lecture, les mots semblent incapables de décrire cette passion, ce génie, ces émotions qui remplissent un roman tel que Le comte de Monte Cristo. J'aime Dumas de tout mon coeur. Tous les meilleurs films du monde ne pourraient pas m'offrir cette bourrasque de sentiments qui m'a traversé durant les 1400 pages de ce texte. Encore plus que d'habitude, j'ai pensé en lisant Le comte de Monte Cristo à quel point je plaignais et ne comprenais pas ceux qui n'aimaient pas lire. Comment ne peut-on pas être hypnotisé, englouti, passionné par une histoire telle que celle là? Je ne comprends pas. 
Je ferme les yeux et je revois le château d'If, la cellule d'Edmond, l'abbé Faria ... et j'ai envie de repartir dans cet univers, retrouver Maximilien, Valentine, Albert, Mercédés ... A l'évocation d'un seul nom, d'une seule scène, d'une seule image, je suis saisie ... Et je pense que plus les années passeront plus mon amour pour ce roman grandira. 

«On fit encore quatre ou cinq pas en montant toujours, puis Dantès sentit qu'on le prenait par la tête et par les pieds et qu'on le balançait.«Une, dirent les fossoyeurs.- Deux.- Trois !»En même temps, Dantès se sentit lancé, en effet, dans un vide énorme, traversant les airs comme un oiseau blessé, tombant, tombant toujours avec une épouvante qui lui glaçait le cœur. Quoique tiré en bas par quelque chose de pesant qui précipitait son vol rapide, il lui sembla que cette chute durait un siècle. Enfin, avec un bruit épouvantable, il entra comme une flèche dans une eau glacée qui lui fit pousser un cri, étouffé à l'instant même par l'immersion. Dantès avait été lancé dans la mer, au fond de laquelle l'entraînait un boulet de trente-six attaché à ses pieds.La mer est le cimetière du château d'If.»
(Le comte de Monte Cristo, A. Dumas, Tome 1, Folio, 2012, p 218/219).

(Sources images : pastichesdumas.com)

mercredi 20 novembre 2013

Rentrée ...

... avec des couleurs plein la tête et l'esprit léger ... et des avis de lecture aussi! 

 (photos Laos, Romanza, 2013)

lundi 4 novembre 2013

Ce n'est qu'un au revoir ...

 ... Promis, je reviens! Je pars pour deux semaines ... 
Le Laos et ses merveilles m'attendent. 


Deux semaines pour se ressourcer, prendre le temps de vivre et penser à soi. 

Bien sûr, j'ai longtemps réfléchi aux lectures que je glisserai dans mes bagages. J'ai fouillé du côté de la littérature laotienne mais je n'ai rien trouvé de tentant. Alors, je me suis dit que ces deux semaines étaient l'occasion d'ouvrir un gros pavé classique, une lecture toujours repoussée par manque de temps. J'embarque Le comte de Monte Cristo de mon cher Dumas.  Je l'ouvre dans l'avion ... 
(En attendant, j'ai ouvert un recueil de nouvelles de Zweig. Un délice comme toujours! Je le finis sûrement ce soir, mais vous aurez mon avis qu'à mon retour).


A très vite!

samedi 2 novembre 2013

" Cet endroit... aussitôt que vous y avez mis le pied, il prend possession de vous... "

Simetierre
Stephen King

J'ai lu, 1987.

Louis Creed, un jeune médecin de Chicago, vient s'installer avec sa famille à Ludlow, petite bourgade du Maine. Leur voisin, le vieux Jud Crandall, les emmène visiter le pittoresque " simetierre " où des générations d'enfants ont enterré leurs animaux familiers. Mais, au-delà de ce " simetierre ", tout au fond de la forêt, se trouvent les terres sacrées des Indiens, lieu interdit qui séduit pourtant par ses monstrueuses promesses. Un drame atroce va bientôt déchirer l'existence des Creed, et l'on se trouve happé dans un suspense cauchemardesque... 

Pour moi, la meilleure définition que l'on puisse donner à Stephen King n'est pas « le maître de l'horreur ». Alors oui, bien sûr, il maîtrise le suspense comme personne, ses ambiances étranges et inquiétantes sont si bien rendues que l'on en reste scotché, il a un don pour nous faire flipper avec un rien, mais (tout comme lors de ma lecture de ça), ce qui fait le talent de King pour moi n'est pas son esprit noir et flippant, mais bel et bien ses qualités de conteur. Je suis bluffée. L'histoire de Simetierre est sombre, dure, traumatisante et pourtant l'horreur n'est réellement présente que durant un tiers du roman. Tout comme ça, Stephen King nous offre un roman profond parlant d'amour, d'amitié, parlant de nos peurs les plus secrètes, de nos doutes, nos rêves, nos angoisses. Les romans de Stephen King parlent d'humanité. J'ai longtemps pensé qu'il n'écrivait que des histoires trashs, crues, difficiles à lire tant l'horreur était à son apogée. Depuis ma lecture de ça il y a 4 ans, j'ai compris que King écrivait surtout des romans humains, beaux, touchants et écrits d'une main de maître. Je pense que les lecteurs recherchant une simple histoire gore risquent d'être déçus. Les choses ne s’accélèrent qu'à la page 300 (sur 570). Les premières pages sont là pour installer l'ambiance, nous mettre en condition, nous faire aimer assez les personnages pour être bouleversé par leur sort (comme j'ai eu envie de crier). On croirait presque lire un roman nous contant l'histoire tranquille d'une famille américaine. Certaines scènes font froid dans le dos mais au final elles ne sont pas très nombreuses. Bon par contre, elles sont intenses … autant vous prévenir. Mais plus que des scènes gores, King arrive à nous terrifier avec un rien. C'est un magicienL'horreur chez King est comme une ombre qui plane au-dessus de notre tête. Quelque chose de toujours présent, près de nous, prêt à frapper. Il installe si bien l'ambiance qu'il arrive à nous faire sursauter seulement en décrivant le bruit d'une feuille qui tombe d'un arbre. J'en reste bluffée. L'une des images les plus flippante du roman est (je pense) celle de Zelda, la soeur de Rachel. Pas de goutte de sang, pas de trucs dégoûtants lors de la description de ce personnage et pourtant, Zelda m'a complètement traumatisée. Chapeau à Mr King! Et puis, il y a Church aussi. Ce chat m'a donné quelques sueurs froides. Pourtant, King ne raconte rien de vraiment terrifiant, mais il sait avec quelques mots nous rendre tellement bien une ambiance que Church, sa démarche maladroite, son odeur de terre, ses yeux vitreux, m'a angoissée comme jamais. 
Simetierre est sublime. King prend le temps de nous présenter la famille Creed. On s'attache à eux, on les aime. J'ai aimé les suivre dans leur quotidien. Ellie et Gage sont devenus mes enfants, Louis m'a souvent beaucoup fait rire et Rachel m'a touché. Mais surtout, ses quatre personnes m'ont bouleversé. L'image du petit Gage me hante. Je n'arrive pas à faire mon deuil de cette histoire. Mon petit garçon a l'âge de Gage et je n'ai pas arrêté de penser à lui en regardant mon fils. Tout comme les personnages de ça, les visages de Simetierre m'accompagneront toute ma vie. J'aime cette sensation à la fin d'une lecture. J'ai laissé des amis derrière moi. 
Stephen King arrive à nous faire imaginer tellement bien l'histoire que tout prend forme devant nos yeux. Je voyais la maison des Creed, ainsi que la route la séparant de celle de Jud, le chemin du "Simetierre", ... On rentre véritablement dans un autre monde, un univers parallèle au nôtre.
Si King n'écrivait que des histoires noires où la violence gratuite regorge, où les descriptions tombent dans le sanglant, je ne le lirai pas. Tout ça ne m'intéresse pas. Mais King écrit de sublimes histoires d'hommes, de femmes, d'enfants, il parle de sentiments universels et profonds, tout ça accompagné par une ambiance délicieusement angoissante. 
Tout comme après la lecture de ça, j'emmène avec moi plein d'images : le petit Gage jouant au cerf-volant, Zelda hurlant dans son lit, les réflexions amusantes de Louis, les camions roulant bien trop vite, le regard inquiétant de Church, Jud busant sa bière devant sa maison, des traces de pas boueux, ... 
Dérangeant mais pas voyeur, angoissant mais sublime, … Un roman qui me poursuivra longtemps. Décidément je n'en ai pas fini avec King. 

On a probablement tort de penser qu'il peut y avoir une limite à l'horreur que peut éprouver l'esprit humain. Au contraire, il semble qu'à mesure que l'on s'enfonce plus profondément dans les ténèbres de l'épouvante, une espèce d'effet exponentiel entre en jeu. Pour aussi déplaisant qu'il soit de constater, l'expérience humaine tendrait plutôt à valider l'idée suivant laquelle l'horreur suscite l'horreur, une calamité accidentelle engendrant d'autres calamités - parfois voulues celles-là - jusqu'à ce que les ténèbres finissent par tout recouvrir à la façon d'une tache d'encre qui s'étale progressivement sur un buvard."
(Simetierre, S. King, J'ai lu, 1987)


(Source image : deviantart.com)


vendredi 1 novembre 2013

Il y a des squelettes dans le placard!

Halloween party
R L Stine

J'ai lu, 1997.

Halloween ! Au lycée de Shadyside, on ne parle plus que de cela. Justine, la nouvelle, donne une fête. Et tous s'interrogent. Pourquoi a-t-elle décidé d'inviter Terry, Cindy, Lester, et les autres ? Neuf convives. Choisis au hasard ? Arrive enfin le jour J. Chacun arrive déguisé en vampire, en squelette... Les costumes sont plus vrais que nature, le décor aussi : toiles d'araignée, crânes en papier mâché : tout le monde s'amuse à se faire peur, c'est Halloween ! Jusqu'au moment où l'on découvre Lester dans un placard. Mais cette fois, ce n'est plus un jeu : le garçon est bel et bien mort, un poignard planté en plein coeur. Dès lors, la fête vire au cauchemar...

Je pense que toutes les personnes de ma génération se souviennent de R L Stine, l'auteur de la série Chair de poule. Que ce soit en livre ou à la télévision le week-end, ces petites histoires terrifiantes ont passionné des milliers de jeunes. Je me souviens surtout, pour ma part, de La tour de la terreur. Lu à la pré-adolescence, ce roman m'avait fasciné. L'histoire de ces deux enfants poursuivis par un bourreau du moyen-âge alors qu'ils visitaient gentiment la Tour de Londres m'a longtemps perturbée. Ce terrible personnage au visage caché et traînant sa hache derrière lui était assez terrifiant. Bref! Il y a quelques années, durant un swap Halloween, j'ai reçu Halloween party, un roman de R L Stine que je ne connaissais pas. Englouti en moins de deux heures, ce roman m'a fait passé un agréable moment. Alors l'écriture est franchement fade, le style n'a rien d'exceptionnel ou de particulier et le tout est très stéréotypé. Mais je dois reconnaître que R L Stine a beaucoup d'idées. Je trouve ses histoires assez originales et prenantes. Celle de La tour de la terreur m'avait laissé cette impression et Halloween party le confirme. R L Stine est doué pour les histoires de fantômes, de pantins diaboliques, de maisons hantées et de vengeances. Alors même si la forme est franchement moyenne, l'histoire, quant à elle, est sympathique et on embarque. Halloween party m'a rapidement accroché et les 150 pages sont passées très vite. 

" Une tombe toute biscornue se dessinait sous la lueur blafarde de la lune. Les lettres gravées dans la pierre étaient recouvertes de mousse, mais une partie de l'épitaphe était encore lisible : MORT LE 31 OCTOBRE 1884. Terry Ryan avançait d'un bon pas pour passer devant la tombe le plus vite possible, mais Cindy Meyer, sa petite amie, le retint par la manche. "
(Halloween party, R L Stine, J'ai lu, 1997, p 5)