samedi 17 avril 2021

" Ce n'est pas le coupable qui importe . Ce sont les innocents "

Témoin indésirable

Agatha Christie
Editions les masques, 1966.

Dans la maison où a été assassinée Mme Argyle, n'étaient présents à l'heure du crime que le mari, la gouvernante, une infirmière et les cinq enfants adoptés par le couple. Déclaré coupable, un des garçons est mort en prison quand, deux ans après le procès, un témoin à décharge se présente pour confirmer son alibi. Cependant, la famille fera grise mine à cet homme scrupuleux venu réhabiliter le jeune homme. C'est qu'il n'y a pas qu'une vérité : celle que fera éclater le docteur Calgary est bien sombre et, plus cruellement que tout autre, blessera bien du monde.

Voici un Agatha Christie au scénario très alléchant. 

Alors qu'un crime au sein d'une famille a été résolu il y a plusieurs mois, un témoin incongru vient réfuter cette sentence. Le criminel ne peut pas être celui qui a été condamné et mort en prison, car ce dernier était avec le témoin en question au moment des faits. Mais alors? Cela signifie que le meurtrier impuni est toujours présent au sein de la famille? Qui est-ce? 

Le propos est brillant et très ingénieux. Si cette sublime intrigue est digne d'Ils étaient dix (anciennement nommé Les dix petits nègres) ou du Crime de l'Orient express, l'ensemble du roman n'en a pas la profondeur. Tout le génie de ce roman est dans cette situation pour le moins inconfortable : un criminel vit en tout impunité dans la famille mais personne ne sait de qui il s'agit. En ce qui concerne le crime en lui même ainsi que le nom du coupable, il n'y a rien de bien incroyable. J'ai été presque déçue de la résolution de l'intrigue. L'intérêt principal réside dans ce huis clos plein de non dits maîtrisé d'une main de maître et dans la psychologie de ces personnages troubles que Christie sait si bien traiter.

Bien qu’elle ne fût plus tout à fait jeune avec ses trente-six ou trente-huit ans, elle était très séduisante cette Gwenda : un corps moulé à souhait, une chevelure et des yeux d’un noir intense. Mais ce qui retenait particulièrement l’attention, c’était la vitalité du personnage, alliée à la vive intelligence du regard. Le premier, Argyle rompit le silence, non sans une certaine froideur : — Je n’ai pas l’impression de compliquer quoi que ce soit, docteur, et ce n’est nullement mon intention. Il serait peut-être préférable d’en venir au sujet même ? — Parfaitement d’accord. Auparavant, je tiens à vous exprimer mes regrets des paroles qui m’ont échappé. Elles sont dues à l’insistance avec laquelle votre fille et vous-même avez affirmé que l’affaire en question était définitivement close. Ce qui ne correspond nullement à la réalité.


(Photos : Romanza2021)