José Corti, 1989.
- La route : description d'un chemin sans réels début ni fin. Images de paysages.
- La presqu'île : L'errance d'un homme qui attend l'arrivée (pas sûre) de sa compagne par le train.
- Le roi Cophetua : Un homme est invité dans un château étrange par une ancienne connaissance. Son hôte ne vient pas. Il observe la demeure.
Prendre ce roman nécessite un calme et une détente absolue. Tout dans ce livre nous transporte. Si on lutte contre cette prose, que notre esprit s'évade, qu'on pense à autre chose, alors pas la peine d'aller plus loin. Laissez-vous faire! Vous n'avez qu'à imaginer ... c'est tout! Julien Gracq s'occupe du reste. Paysages envoûtants, frôlant le paranormal ; images étranges ; éveil des cinq sens ; mélange de la prose et de la poésie ; ... Tout dans ce roman est une détente du corps et de l'esprit. Presque pas d'action, que des images, des sensations. Pour apprécier ce roman, il faut se laisser aller et déguster chaque mot. Roman sur l'attente, le questionnement. Roman à savourer, à réfléchir, à penser.
Un roman de paix qui ne souffre pas une âme trop agitée.
"De la pénombre qui baignait le coin droit, au bas du tableau, je vis alors se dégager peu à peu un personnage en manteau de pourpre, le visage basané, le front ceint d’un diadème barbare, qui fléchissait le genou et inclinait le front dans une posture d’un roi mage. Devant lui, à gauche, se tenait debout – très droite, mais la tête basse – une très jeune fille, presque une enfant, les bras nus, les cheveux noués. Le front penché très bas, le visage perdu dans l’ombre, la verticalité hiératique de la silhouette pouvaient faire penser à quelque Vierge d’une Visitation, mais la robe n’était qu’un haillon blanc déchiré et poussiéreux, qui pourtant évoquait vivement et en même temps dérisoirement une robe de noces. Il semblait difficile de se taire au point où se taisaient ces deux silhouettes paralysées. Une tension que je localisais mal flottait autour de la scène inexplicable : honte et confusion brûlante, panique, qui semblait conjurer autour d’elle la pénombre épaisse du tableau comme une protection – aveu au-delà des mots – reddition ignoble et bienheureuse – acceptation stupéfiée de l’inconcevable."
(Le Roi Cophetua in La Presqu'île, José Corti, pages 223-224)
(Source de l'image : malcontenta.blog.lemonde.fr)
2 commentaires:
Gracq est un grand maître des mots et j'ai été émerveillée de lire cette longue nouvelle, admirable, envoûtante et dépouillée de toute histoire, simplement sur la route; sans compter la beauté des deux autres nouvelles de ce livre...
Connais-tu la très belle adaptation au cinéma du "Roi Cophetua" par André Delvaux (neveu du peintre Paul Delvaux) ?
"Rendez-vous à Bray" était très apprécié par Julien Gracq qui, en général, aimait peu les transpositions cinématographiques des oeuvres qu'il révérait...
Le film avec Mathieu Carrère, Roger Van Hool, Anna Carina et Bulle Ogier existe en DVD...
J'ai réalisé (grâce à Rose et Lili, entre auutres) un long article sur l'univers de J. Gracq (rencontré à St-Florent en août, quelques mois avant sa disparition de ce monde) : article-fleuve que tu pourras retrouver en :
http://www.fleuvlitterature.canalblog.com/
Ton site est magnifique et éclectique... et tu ne colles pas à "l'acualité" des navets... alors, pour toutes ces raisons : bravo !!!
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