lundi 23 septembre 2013

Et nous? Qu'aurions-nous fait?

Le Chancellor
Jules Verne

Le livre de poche, 2008.

Les passagers qui montent à bord du Chancellor à destination de Liverpool ignorent qu'ils s'apprêtent à vivre de terribles épreuves, dont ils ne sortiront pas tous vivants : incendie, tempête, naufrage, dérive sur un radeau, cannibalisme... S'inspirant du tragique épisode de la Méduse, Jules Verne écrit ce roman sous la forme d'un journal de bord ; à travers les yeux d'un passager, le lecteur suit le destin d'hommes et de femmes luttant pour leur survie et dont la force morale ne surmontera pas toujours la sauvagerie. Sur le thème de la frontière ténue qui sépare la civilisation de la barbarie, Jules Verne écrit là, selon ses termes, un texte " d'un réalisme effrayant".


Je viens de vivre une totale "lecture immersion"... et j'en suis encore toute bouleversée. 
Le Chancellor est mon 2nd Jules Verne après Le château des Carpathes. Avec cette seconde lecture, je commence à comprendre le génie de cette grande plume de la littérature française. 
Jules Verne a le don de nous plonger complètement dans un autre monde. Tel un VRAI conteur, il nous propulse, avec Le Chancellor, dans une aventure terrifiante, une histoire à couper le souffle, qu'il est impossible de quitter même la dernière page tournée. Je crois que Le Chancellor fait parti des livres les plus angoissants que j'ai lu. J'étais oppressée. Je me voyais sur ce navire à deux doigts du naufrage. J'étais entourée par la mer déchaînée à perte de vue. Puis sur ce radeau de fortune, luttant pour ma survie, observée par les autres passagers qui ne voyaient en moi qu'un moyen de se nourrir, un morceau de viande. J'ai ressenti physiquement des émotions dures, violentes, terrifiantes. Ce huis clos m'a engloutie durant plusieurs jours. Parfois pleine d'espoir, parfois résignée, j'étais à bord de ce radeau. 
Certaines scènes sont franchement dures et elles me hantent encore. Mais aucun voyeurisme. Une plume nette, précise, méticuleuse mais aussi humaine, délicate et poétique. Ce roman est vraiment un coup de cœur  Le sujet est certes difficile, mais il est traité avec tant de génie, de maîtrise et d'humanité qu'il en devient un roman passionnant et bouleversant. Jules Verne parle de l'animalité des Hommes, celle que l'on a tous en nous lorsque la faim, la soif nous torturent. On en vient, après la lecture de ce roman, à se demander ce que nous aurions fait, nous, à bord de ce radeau? 
Et puis, toujours ces sublimes gravures des éditions Hetzel qui donnent un petit plus à la lecture ... Superbes!
J'ai le sourire aux lèvres en voyant sur mes étagères : Vingt mille lieues sous les mers, L'île mystérieuse, De la terre à la lune, Le tour du monde en 80 jours, ... Que de belles heures de lecture qui m'attendent! 

" La nuit s'est passée sans incident. Le matin, au point du jour, j'ai pris la main de la morte, qui était froide et dont les membres étaient déjà raidis. Son corps ne peut demeurer plus longtemps dans la hune. Miss Herbey et moi l'enveloppons dans ses vêtements ; puis, quelques prières sont dites pour l'âme de la malheureuse femme, et la première victime de tant de misères est précipitées dans les flots.
A ce moment, un des hommes qui se trouvent dans les haubans fait entendre ces épouvantables paroles :
" Voilà un cadavre que nous regretterons!"
Je me retourne. C'est Owen qui a parlé ainsi.
Puis la pensée me vient que les vivres, en effet, nous manqueront peut-être un jour!"
(Le Chancellor, J. Verne, Livre de poche, 2008, Chap 23, p 144).

(Source image : Le radeau de La Méduse, Géricault, wikipedia.org)

3 commentaires:

Cleanthe a dit…

Hélas tout n'est pas toujours bon chez Jules Verne. Il a produit aussi quelques récits poussifs. Mais tu n'as que d'excellents titres sur ton étagère. Et je te souhaite de bien agréables moments de lecture en compagnie de ce maître de l'aventure. Je n'est pas lu en revanche ce Chancellor, et là tu me donnes très très envie.

maggie a dit…

C'est étonnant car je ne voyais pas du tout Jules Vernes comme un auteur effrayant. J'avais été déçue apr la relecture du chateau des Carpathes mais il m'en reste un dans la PAL...

Romanza a dit…

Cléanthe : Et j'en suis ravie ... Lis-le!

Maggie : Ce roman est vraiment à part dans l'oeuvre de Verne ... C'est le seul roman au réalisme cru et profond!