samedi 16 février 2013

" Tête basse - Mains sales "

1979
Jean-Philippe Blondel

Pocket, 2005.

1979. Quatre chiffres peints en rouge sur un mur décrépi. Et tant de combinaisons envisageables. Est-ce une date clé? Un code confidentiel? Une mauvaise blague? Une menace camouflée? Une invitation au voyage? Ou encore un signe du destin ? Rien de tout cela. Et un peu tout à la fois. Aux yeux, entre autres, de Virginie, Arnaud, Julien, Hervé, Paul, Elizabeth ou Annie. Respectivement maman rêveuse, jeune garçon perturbé, tagueur rageur, médecin au bout du rouleau, assassin repenti, chagrin d'amour ambulant et propriétaire très en colère. Et tous plus ou moins bouleversés par cette étrange date surgie de nulle part puis qui disparaît un beau jour, emportant avec elle un bien drôle de secret...

J'ai découvert Jean-Philippe Blondel grâce à un concours organisé sur la blogosphère. J'avais eu la chance de gagner 5 titres de cet auteur. J'ai rapidement lu Accès direct à la plage, puis sans raison particulière, j'ai mis de côté les 4 autres romans reçus. Il y a 2 jours, j'ai eu envie de remettre la main dessus. Mon choix s'est porté sur 1979. J'ai aimé ce titre (étrange, venant d'une phobique des nombres!) et le sujet me plaisait. J'aime les intrigues en forme de puzzle. Et puis tout comme les personnages de ce roman, cette année reflète une partie de ma vie ... C'est la date de naissance de mon frère aîné. 
J'ai aimé dans ce roman tout ce qui m'avait plu dans Accès direct à la plage. L'amour, l'espoir, le sourire cachaient sous une grosse couche de tristesse, de mélancolie collante et poisseuse. J'aime l'idée que les drames ne sont pas toujours spectaculaires et tragiques, mais que nous possédons tous notre part de noirceur et de secret. 
Virginie, Arnaud, Julien et tous les autres me sont devenus, en moins de 200 pages, familiers. Il y en a certains, comme Virginie ou Paul qui m'ont émue et attendrie. D'autres comme Annie ou Elizabeth qui m'ont mise mal à l'aise, j'ai ressenti moins d'affinités voire une totale aversion envers certains. Jean-Philippe Bondel nous laisse faire nos propres choix. Il ne nous dit pas qui aimer, qui haïr. Il nous expose les personnalités de tous ces gens, voisins, soeurs, connaissances, à nous de les aimer ou non. 
Jean-Philippe Blondel a une écriture fine. Il plonge totalement dans l'âme humaine, la dissèque et l'analyse, mais sans jamais tomber dans la lourdeur, le voyeurisme ou l'exagération. Il n'y a pas de jugements, pas de partis pris. Blondel parle d'hommes et de femmes avec sensibilité, respect et compréhension.
Une fin à énigme qui nous donne envie de reprendre l'histoire dès la première page. J'aime avoir la sensation d'avoir MON interprétation de l'histoire, de me l'avoir appropriée. 
Une belle lecture. Je compte bien ouvrir rapidement un autre de des textes de Monsieur Blondel. 

" Assise sur un banc, je regarde défiler les années - tous les aujourd'hui sont des premiers jours, mai 1978, je pars dans une course folle, je suis dans une voiture lancée à tombeau ouvert, il y aura 1979, une année qui ne correspond à rien, avec tous ces chiffres que je déteste, les impairs, le un, hautain et inutile, être unique, c'est tellement pitoyable ; le sept, trop raide et comme endimanché, incapable de bouger à cause de cette barre qui lui traverse le corps ; le neuf? Le neuf c'est le pire, c'est un mielleux, une vipère, il voudrait la rondeur d'une chiffre pair, il voudrait des courbes comme des seins ou un ventre rassurant, mais la perfidie reprend le dessus et il se termine en queue comme un scorpion, prêt à tuer d'un coup l'enfant qu'il porte dans son ventre. "
(1979, J-P Blondel, Pocket, 2005, p 21
(Source image : gentside.com)

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