La danseuse d'Izu et autres nouvelles
Yasunari Kawabata
Le livre de poche, 2008.
Prix Nobel de littérature en 1968, Yasunari Kawabata ne révéla peut-être jamais aussi bien que dans les cinq nouvelles de La Danseuse d'Izu la poésie, l'élégance, le raffinement exquis et la cruauté du japon.
Est-ce là ce « délicat remue-ménage de l'âme » dont parlait le romancier et critique Jean Freustié ? Chacun de ces récits semble porter en lui une ombre douloureuse qui est comme la face cachée de la destinée.
Un vieillard s'enlise dans la compagnie d'oiseaux, un invalide contemple le monde dans un miroir, et ce miroir lui renvoie d'abord son propre visage dans une sorte de tête à tête avec la mort...
Rechercher le bonheur est aussi vain et aussi désespéré qu'apprivoiser une jeune danseuse, un couple de roitelets ou le reflet de la lune dans l'eau. Voici cinq textes limpides et mélancoliques, aussi pudiques sans doute dans l'expression que troublants dans les thèmes.
Bien que je connaisse Kawabata depuis longtemps l'ayant croisé régulièrement sur les étagères des librairies, des bibliothèques et du CDI de mon lycée, je n'avais encore jamais eu l'occasion de le lire. C'est chose faite! Et j'ai, ma foi, bien aimé.
J'aime énormément la littérature asiatique, pourtant, j'ai peu lu d'oeuvres japonaises. Chaque fois que j'en lis une, je suis bercée par la poésie, la douceur, la contemplation qui émanent de ces textes, mais je suis également totalement dépassée (en temps qu'occidentale) par les symboles, les références, les subtilités. Après la lecture de ce recueil de nouvelles, j'ai le même constat. J'ai aimé ma lecture, j'ai été bercée par les mots de Kawabata, par sa poésie et sa finesse d'analyse, mais je n'ai malheureusement pas tout saisi. Il a les sens cachés, les images, les métaphores, tout est subtil et parfois, je me suis un peu perdue.
La première nouvelle, intitulée La danseuse d'Izu, est pleine de beaux paysages et de poésie mais le sens m'a échappée. J'ai adoré la seconde, Elégie, que j'ai trouvé tout simplement sublime. Elle m'a beaucoup rappelée Lettre d'une inconnue de Zweig. J'ai trouvé Bestiaire, la troisième nouvelle, très glauque. Elle m'a rendue très mal à l'aise. Ces histoires de morts d'oiseaux m'a profondément dérangée. Je n'ai pas tout compris à Retrouvailles mais La lune dans l'eau, dernière nouvelle, est très belle. Le personnage féminin m'a émue.
Au final, je garde plusieurs images marquantes de ma lecture. Certaines sublimes comme les visions de l'héroïne de Elégie (cette nouvelle pourrait être un sujet de roman à part entière tant elle est riche), d'autres très dérangeantes comme la mort des roitelets de Bestiaires (j'ai des visions d'horreur encore maintenant ... J'aimerai vraiment lire une analyse de ce texte). Kawabata a gagné son pari, il m'a marquée. Je pense que je relirai un texte de cet auteur que j'ai trop longtemps ignoré. Certes, je n'ai pas toutes les clefs en mains pour comprendre toutes les subtilités de la littérature japonaise, mais je me suis laissée bercer par les mots et les images de ces belles (et parfois déstabilisantes) nouvelles.
Je me rends compte qu'il y aurait bien des choses à dire sur ce recueil si riche, mais malheureusement je n'en ai pas les moyens ...
A lire!
" Une nuit, dans la salle de bain, voici quatre ans, une senteur violente m'assaillit. Sans pouvoir la définir, je jugeai incongru de respirer un parfum si puissant alors que j'étais nue. J'eus alors un éblouissement ; je perdis connaissance. A ce moment précis, vous, dans un hôtel, aspergiez de parfum la couche blanche de votre nuit de noces. Vous veniez de vous marier, sans m'en avoir fait part, après m'avoir abandonnée. J'avais beau, sur le moment, tout ignorer de ce mariage, je me rendis compte plus tard, à la réflexion, que cela se produisit à ce moment précis. "
(Elégie in La danseuse d'Izu, Kawabata, Livre de poche, 2008, p 40)
2 commentaires:
J'ai beaucoup aimé également Elégie. Kawabata est un de mes auteurs préférés, un sommet de délicatesse. Ses évocations de la nature, de la part silencieuse des sentiments sont sublimes. Essaye ses romans. Tu devrais y trouver beaucoup de plaisir.
Cleanthe : Je prends note! Merci!
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