vendredi 6 janvier 2012

Que la partie commence ...

La joueuse de go
Shan Sa

Folio, 2009.

Depuis 1931, le dernier empereur de Chine règne sans pouvoir sur la Mandchourie occupée par l’armée japonaise.
Alors que l’aristocratie tente d’oublier dans de vaines distractions la guerre et ses cruautés, une lycéenne de seize ans joue au go. Place des Mille Vents, ses mains infaillibles manipulent les pions. Mélancolique mais fiévreuse, elle rêve d’un autre destin. "Le bonheur est un combat d’encerclement". Sur le damier, elle bat tous ses prétendants. Mais la joueuse ignore encore son adversaire de demain : un officier japonais dur comme le métal, à peine plus âgé qu’elle, dévoué à l’utopie impérialiste. Ils s’affrontent, sans un geste, jusqu’au bout, tandis que la Chinevacille sous les coups de l’envahisseur qui tue, pille, torture.
En ouvrant ce roman, je m'attendais à un texte poétique, tout en douceur et délicatesse. Je me suis vite rendue compte qu'il s'agissait au contraire d'un roman d'un grand réalisme, violent et parfois cru. Une fois mon étonnement dissipé, j'ai pu me plonger pleinement dans ce texte. 
Je ne peux pas dire si ce roman me marquera à vie ou non ... Je ne sais pas si dans quelques mois j'arriverai à me souvenir de certaines scènes ... Mais j'avoue que sur le moment, durant la lecture de ce roman, j'ai aimé. Certes, le personnage masculin, le jeune japonais, est antipathique, la chinoise parfois difficile à comprendre, l'écriture de Shan Sa manque  cruellement de naturel, mais j'ai embarqué dans cette terrible et triste histoire. La fin (pourtant mélodramatique, disons-le) m'a vraiment bouleversée.  J'ai presque versé ma petite larme. J'ai aimé que ces deux êtres sensuels, attachés à la chair, s'aiment sans se toucher, sans contact. Ils s'aiment d'un amour bien plus touchant, plus fort, plus beau qu'un amour passionnel et possessif. 
J'ai aimé également me replonger dans l'Asie. Moi qui aime tant la littérature asiatique, j'ai la sensation de l'avoir trop longtemps laissé de côté. 
Je n'ai pas trouvé dans La joueuse de go la poésie à laquelle je m'attendais.  J'y ai tout de même trouvé une belle histoire, pas sans défauts, mais touchante, vraie, juste.
Un roman facile à lire pour son écriture, dur dans son propos (attention aux âmes sensibles). Un roman à découvrir .... 
Je verrai dans quelques temps ce qui me reste de ce roman ... 


"Au loin, une jeune femme occupée à jouer contre elle-même. Chez nous, il est impensable qu'une femme demeure seule dans un lieu fréquenté par les hommes. Intrigué, je m'approche.
Elle est plus jeune que je ne l'imaginais, et porte une robe de collégienne. La tête appuyée dans le creux de sa main, elle est plongée dans sa réflexion. Sur le damier, les pions placés avec intelligence m'incitent à un examen plus attentif.
Elle lève la tête, front large, yeux bridés comme deux feuilles de saule délicatement dessinées. Je crois voir Lumière à l'âge de seize ans. Cette illusion s'évanouit aussitôt. L'apprentie geisha avait la beauté timide, recroquevillée. La Chinoise m'observe sans rougir. Chez nous, l'élégance est pâle et les femmes fuient la soleil. À force de jouer en plein air, la gamine a le visage nimbé d'un charme étrange. Son regard atteint mes prunelles savant que je ne baisse les yeux.
Elle m'invite à une partie de go. Je fais le difficile pour rendre mon rôle plus crédible."

(La joueuse de go, Shan Sa, Folio, 2009)

(Source image : livegalerie.com)

1 commentaire:

Emilie a dit…

Bonjour, J'avais vraiment aimé ce livre lu il y a déjà quelques années... c'est vrai qu'il est assez violent. Par contre c'est le seul livre de Shan Sa que j'ai apprécié, les autres (Impératrice notamment) m'ayant ennuyé.