mardi 15 mai 2012

Têtue comme une Bette!

La cousine Bette
Honoré de Balzac
Challenge Gilmore girls


Livre de poche, 1997.

Lisbeth Fischer, surnommée la cousine Bette est appelée à Paris par Adeline Hulot (sa cousine), femme admirable qui supporte les infidélités de son vieux mari le baron Hulot, libertin éperdu. Aigrie, laide, sèche, maladivement jalouse d’Adeline et de sa beauté, Lisbeth s’acharnera au malheur de la baronne Hulot et de sa fille Hortense.
wikipedia.org

Mon déménagement m'ayant pris quasiment tout mon temps depuis 1 mois, j'ai lu ce roman à une vitesse d'escargot sous morphine. Pourtant, mes amis, ce fut du grand Balzac! J'ai aimé partagé 1 mois de ma vie avec tous les personnages de ce succulent roman et ce fut un plaisir d'ouvrir La cousine Bette même pour 3 minutes. 
Je crois bien qu'avec Le père Goriot et Eugénie Grandet, La cousine Bette a une place de choix dans mon Panthéon balzacien. Ce roman se lit à la fois comme un drame et comme un vaudeville. On est bouleversé, ça remue les tripes, on se rebelle, on crie à l'injustice, mais on rit aussi, on excuse, on pardonne. Mari infidèle, maîtresses aux multiples amants, épouse trompée, pièges sournois, plans diaboliques, alliances improbables ... Bref! Il s'en passe des choses chez Balzac. 
L'histoire de la pauvre Adeline Hulot m'a attristée comme jamais. Certes, elle est un peu bornée dans sa fidélité et sa compréhension (ce qui n'arrange pas sa situation), mais elle est si bonne et aimante qu'on lui pardonne bien vite et on est réellement ému par ce qui lui arrive. La fin m'a laissée toute chagrinée (ou totalement en colère ... ça dépend de quel personnage je parle!).
Bette n'est en fait qu'une ombre planant sur le roman. C'est un personnage physiquement assez absent mais qui pourtant a un rôle déterminant. Avec Valérie Marneffe (Quel démon! Mais quel classe, quelle intelligence!), Bette est celle qui fera tout pour détruire la famille Hulot et se hisser au-dessus d'elle. Jalouse depuis l'enfance de la belle et pieuse Adeline, elle ne rêve que de se venger de celle qui a tout, beauté, richesse, vertus. J'ai été assez compréhensive vis à vis de la cousine Bette. Certes, c'est une femme cruelle et égoïste, mais j'ai ressenti de l'empathie pour elle surtout lorsqu'on lui retire sa seule joie au début du roman, le comte Wenceslaw. 
C'est un roman vraiment palpitant qui nous met dans plusieurs états différents. On passe de la colère en voyant l'attitude de cet obsédé de baron Hulot, puis nous versons une larme devant la fidélité d'Adeline. On hait cette peste de Valérie pour ensuite la plaindre et l'absoudre ... Du très grand Balzac, je vous dis! 
Chose incroyable (pourquoi incroyable d'ailleurs? Après tout, Balzac est un précurseur), Balzac parle ouvertement de sexualité, de sensualité dans ce texte. Je dirai même qu'il ne s'agit QUE de ça. La question du sexe jalonne La cousine Bette (sans vilain jeu de mot). Le baron Hulot est un DSK en puissance, Bette (disons-le clairement) une frustrée,  Adeline une frigide, Valérie ..... (aucun terme élégant ne me vient à l'esprit ... passons!) ... Bref, Balzac nous conte une véritable et gigantesque histoire de ... sexe. Mais attention, c'est joliment dit, c'est bien tourné, ce n'est qu'en sous-entendus adroits et délicats. C'est grandiose!
Balzac n'en finira jamais de me surprendre. C'est la 11ème fois que je le lis et il me fait toujours autant rire, pleurer, crier. Chapeau bas!

Ces malheurs de famille, la disgrâce du baron Hulot, une certitude d'être peu de chose dans cet immense mouvement d'hommes, d'intérêts et d'affaires, qui fait de Paris un enfer et un paradis, domptèrent la Bette. Cette fille perdit alors toute idée de lutte et de comparaison avec sa cousine, après en avoir senti les diverses supériorités ; mais l'envie resta cachée dans le fond du coeur, comme un germe de peste qui peut éclore et ravager une ville, si l'on ouvre le fatal ballot de laine où il est comprimé. De temps en temps, elle se disait bien : "- Adeline et moi, nous sommes du même sang, nos pères étaient frères, elle est dans un hôtel et je suis dans une mansarde." Mais, tous les ans, à sa fête et au jour de l'An, Lisbeth recevait des cadeaux de la baronne et du baron ; le baron, excellent pour elle, lui payait son bois pour l'hiver ; le vieux général Hulot [frère du baron] la recevait un jour à dîner, son couvert était toujours mis chez sa cousine. On se moquait bien d'elle mais on n'en rougissait jamais. On lui avait enfin procuré son indépendance à Paris, où elle vivait à sa guise."
(La cousine Bette, Balzac, livre de poche, 97)


(Source image : maisonarts.forumgratuit.org)

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